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montagnes

PUBLICATIONS XXXI

Poèmes

Orchestre

Jean-Michel TARTAYRE

 

 

 

 

 

MOSAÏQUE PYRÉNÉENNE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Il y a une force en moi, une volonté farouche, qui me poussent vers l’espoir et la lumière.

                                                                                                   Yves Saint Laurent

DAME ASSISE

 

               Vraiment, je ne sais pas. La cohérence mise à part, le procès syntaxique va, pourrait-on dire, de lui-même. J’ai en effet l’idée de la considération due à la cohérence manifeste dans l’écriture, par expérience de la lecture. Pour le reste, les mots vont et s’organisent d’après l’harmonie musicale. La source de cette harmonie est dans l’air. Y adhérant par cohérence, je m’emploie ainsi à donner un poème, me situant dès lors en phase avec la réalité. Ne souhaitant en aucune façon trahir l’intention qui est la mienne de composer, j’aspire à bien entendre la note ; la note juste.

          S’ensuit la structure originale d’un style, que motive le sentiment d’humilité, sans quoi il n’est de création individuelle, ni collective. Prenant acte d’articles mis en voix et de chansons dont l’écoute enrichit la vigilance, le poème peut se réaliser ; moi le percevant fixé dans l’air. Outre que maints supports de lecture, les livres, participent de ladite cohérence. Mais l’air y ajoute considérablement. Je suis donc au fait, en l’état de simple participant, ma condition nécessaire.

           C’est un jardin qui lors m’apparaît. En guise de mots, je forme des bouquets de fleurs. Et leurs fragrances sublimant la musique, le poème sera. Telle prosodie, significative en termes d’armature, aura la transparence du verre ; le verre du flacon. Le sens portera le bouquet à l’attention. Ensemble donnant lieu aux figures, celle du visage autour duquel se propose celle d’une région clémente, apaisante, non dénuée de vestiges. Je parle avec raison de collines vertes qui font le relief de la grande plaine. Le poème servira le plaisir de la découverte et la tranquillité. Je n’obligerai personne, ayant disparu bien loin du cadre afin de me recueillir à son paysage, à son Histoire. Les yeux entièrement faits de bardiglio à l’armature d’acier. Rien ne m’appartenant de tout cela, si ce n’est la volonté de cohérence à la seule idée du poème – que le paysage musical somme toute écrivit.

 

 

 

 

 

 

POÈME NOMADE

 

            Sans crainte. Une avancée dans les parages des mélodies qui comblent ma demeure. Une écoute placée à son degré suffisant où certes les sens sont mobilisés, cependant dans la juste appréciation des rythmes. Ainsi va l’écriture souhaitée pour un poème, ce point de convergence des phrasés verbaux. On comprendra qu’il s’agit d’une structure prosodique où m’apparaît l’idée d’une association raisonnable entre la note et le mot ; ce que l’on pourrait définir en termes de cohérence. Deux signes de nature acoustique conçus en l’occurrence selon le concept d’harmonie. Ma demeure est telle que l’air organise lui-même la création grâce à une saisie sensorielle animant le texte dont je suis l’acteur, autrement dit le sujet. Ayant pour prédicat l’énergie ambiante, s’ensuit la cohérence du sujet écrivant à la table des résolutions poétiques.

             Je vais donc au-devant des paysages musicaux avec tout le respect qu’une telle avancée nécessite ; c’est-à-dire la distance respectueuse qui me gratifiera d’une disparition au profit du contexte évocateur – où siège l’Énonciatrice. M’apparaît ce jour une paroi de granite que je considère à titre de marcheur ayant trouvé un lieu où m’asseoir au terme de plusieurs jours d’aventures. Il est tard le matin, presque midi. La lumière est de faible intensité et les hauts se confondent avec l’épaisseur nuageuse. Déjà les premières gouttes de pluie se font sentir sous la forme d’un crachin laissant prévoir une averse. La paroi, majestueuse dans le silence qui caractérise le plateau, impose, dirait-on, une action de ma part qui se résoudra par l’établissement de ma demeure, que je transporte par ailleurs sur mon dos. Lors se réalise l’action en moins d’une heure, tandis que l’averse débute. Maintenant à l’abri et face à la paroi rocheuse, je perçois les claquements de la pluie et du vent contre les parois de ma demeure, à l’image d’une danse exécutée par un couple de tap dancers. Le carnet de bord à la main, l’air ambiant me suggère des mélodies que le regard intraitable de l’Énonciatrice ainsi posé sur l’idée du poème m’amènera à composer. Un chant :

 

                                              Revenu des régions froides et hostiles,

                                              Je poursuis mon chemin jusqu’à ces hauteurs

                                              Dignes du plus grand respect ; épris de styles

                                              Poétiques, je leur dédie mes labeurs

                                              Quotidiens sur le mode des péristyles,

                                              Comme obligea la Muse à nombre d’auteurs

                                              Rompus à ces phrasés clos par les dactyles

                                              D’écrire, – lui rendant ainsi les honneurs.

                                              La paroi devant ma tente m’octroie l’heur

                                              De rédiger quelques vers en m’appliquant

                                              À tels rythmes anciens dus à la déesse

                                              Bienfaitrice qui gratifie le semeur

                                              Des récoltes heureuses ; en m’expliquant

                                              Aussi que ces hauteurs rappellent la Grèce.

 

 

 

 

 

 

POÈME D’AUTOMNE

 

              De tension aucune, mais un regard simple sur les choses. Il écrit. Le ciel s’est couvert ce jour d’une épaisse couche de nuages. Elle écrit, sur le temps pluvieux qui convient à la saison. Ni plus ni moins. Outre que le désir de poème demeure l’intention première. Associant les mots à cette idée qui les transmue en notes, de fait ils composent. La pluie est ainsi le motif autour de quoi va se construire la prosodie. Il écoute la rythmique douce que font les gouttes d’eau sur les feuilles des ramées ou au sol et chaque instant est un instant de tranquillité. Elle respire à l’automne, à ses airs mélodieux, les senteurs, les chromatismes. Tout leur apparaît d’or et d’airain embellis par la grâce végétale.

               Se fixent en l’occurrence les floralies du sentiment qui naît à cette saison. Leur jardin s’enrichit poétiquement à l’écoute et à l’observation. Ils doivent à ses paysages saisonniers les rythmes et l’inspiration. Leur gratitude va à sa constante de gaieté naturelle que leur suggèrent et transportent faune, flore, au fil des ans. Le chant des fleurs, des oiseaux, les mouvements des arbres au vent léger constituent un cadre favorable à l’envol. Sis au pied de la montagne haute jusqu’au ciel, il n’en perçoit aujourd’hui que son manteau de nuages et de pluie. La plume s’est déjà portée au-delà, vers le sommet. Cette page lui en est témoin, qui est le fruit de son voyage. Aussi le je du poème a-t-il pour référent majeur l’Énonciatrice qui lui dit les mots et la musique. Le poème de fait institue le cadre d’un dialogue singulier entre une intention et l’inspiration réelle dont voici le fruit au retour de la plume :

 

                                             Satisfaite à l’idée que vous va la saison

                                             Au mieux, par ses harmonies et sa variété,

                                             Je vous transmets mes vœux pour vous donner raison

                                             Quant à l’agrément qu’on a, d’hiver en été,

                                             De pouvoir se plaire au saisonnier bienfait.

                                             La nature est ainsi qu’en elle règne la grâce

                                             Vers laquelle je vous sais transporté de fait ;

                                             Recevez donc ces mots sans craindre ma disgrâce.

 

BALLADE MATINALE

 

           Voir, en toute cohérence, les nuages selon leur flottement, me donne de fait l’idée du poème qui va, se structurant à leur image, oui par mimesis. Pourquoi ? Ils sont le motif de l’écriture et leur promenade, tranquille et sereine, soulage grâce à ses variations multiples d’une image que j’aurais de moi excessive. En d’autres termes je participe, en l’observant, de la promenade ; les mots ajoutent ou plutôt en sont le reflet, eux-mêmes inscrits dans les nuances de l’air. Il se peut que naisse dès lors une mélodie, dont je ne connais pas à ce stade de ma progression écrite la portée musicale.  Mais elle se réalise au fil des mouvements multiples de la marche vaporeuse, de note en note.

             Ce sont des formes chromatiques, leur relief s’avère le support du poème, de l’évanescence azur aux épaisseurs grises et blanches. Les phrases s’organisent autour, silencieuses pareilles à la promenade, sans exclure du tout sa dimension musicale. Des voix pourvoient déjà à son orchestration, qui se sont réunies pour l’accompagner. Ainsi cuivres, bois et cordes, parfois augmentées de la sourdine, donnent lieu à l’écoute, outre que la promenade poursuit son activité incessante de marche aérienne placide, au silence évocateur.

             Je parle d’une symbiose donc, entre le motif et le chant qu’il occasionne. Seule l’écriture existe. Je n’apparais en rien dans son procès. Elle se conçoit en l’occurrence comme l’auto-projection d’un climat d’automne où je ne participe qu’à titre d’observateur de la promenade et de son orchestration. Mon statut est celui de spectateur confortablement assis au parterre et tous les regards sont notables. Ce sera la transmutation par le ressort du poème, règne des figures aériennes, qui prend forme. L’orchestre avisé l’interprète maintenant, m’accomplit. Se distinguent l’uniformité du relief en mouvement qui se donne à voir à l’instar d’un monochrome blanc et les rythmes d’une ballade joyeuse, sur leur degré de complémentarité. Quand s’envole la plume vers des hauts que la promenade protège ce matin ; où je n’ai pas accès.

 

UNE IMPROVISATION

 

            La respiration s’ancre dans un paysage côtier. Le paysage est la respiration. Souffle des vents d’automne, nuages, variation des vols d’oiseaux selon des trajectoires multiples, réitérées autour de maints axes, la mer en harmonie avec la montagne sur le plan des nuances que propose la lumière avec le relief. Une lecture du moment, passé midi, et qui n’aurait de conséquence qu’en matière d’amélioration. Un moment amélioré grâce à cette lecture, en d’autres termes. Le rythme est apaisant en effet. Rien n’oblige le lecteur mais du fait de son sentiment d’appartenance au décor, l’obligation serait plutôt une invitation à la paix prégnante.

         Tout est calme et tout est beau. Parfois une voile perçue au loin peut inspirer une écriture sur cette plage de silence que la voile, à son passage, évoque. Et cet intervalle sera peut-être aussi l’occurrence d’écrire dessus la page, le décor et ses rythmes mis en mots ; mots qui sont des notes. La voile au loin, de fait par sa forme et sa marche douce, piano dit-on, porte déjà l’air. Le lecteur écrit, le rythme identifiant la voile à l’essor de la plume qui confère peu à peu, le lecteur s’en rend compte, à la page les signes d’une ballade, le rythme paraît donc emprunter à la mer sa musique, telle une vibration ténue de xylophone, aux vents la teneur du cuivre, aux forêts alentour le chant du bois, à la montagne approchant le ciel, la teneur des cordes.

          Il s’ensuit dès lors une partition pour piano et orchestre, dont le non négligeable thème de la voilure, humble face à l’horizon, sera porté par la voix du Chœur. Le lecteur fixe le concert des éléments qui s’organise autour dudit thème par le ressort de la voie du regard et de l’écoute. La plume, quant à elle, est la voile passagère du décor, donnant à la page telle ballade. La page devient l’air suggéré, inspiré. Le lecteur au piano, comme on dirait tenant la barre, la transmue maintenant en harmonie acoustique dont résonne sa demeure. Orchestré le sentiment naturel de bien-être auquel le décor l’invita, la page est devenue le bercement de la plage d’automne au-delà de quoi une voile, humble devant l’horizon, se proposa pour leitmotiv, soit comme donnant le la.

 

 

 

UN AIR DE SAISON

 

            C’est une musique proposée. Passagers des hauts, les nuages m’instaurent les notes, douces et cohérentes, eu égard à quoi le désir de composition qui m’étreint se penche sur la page, inspiré. On pensera à raison à une transmutation induite. J’observe, sans m’imaginer de statut autre que celui de désirant, les mouvements de cette promenade des hauts, proche du sommet, néanmoins sous l’aspect d’un voile à la relative transparence ne dissimulant donc pas la majeure partie du relief ; car ce jour les nuages paraissent légers, presque évanescents. Confondus à la blancheur des neiges de saison, par la vue que j’en ai depuis ma demeure jouxtant la plage, ils vont dans le ciel comme des groupes de flocons suspendus et que le vent conduit.

            Certains tournent en un cercle inégal près de la paroi la plus élevée, tandis que d’autres, plus distants, s’en éloignent et s’étendent loin à l’horizon. Aussi les notes adoptent-elles, par le phénomène de la mimesis, les formes et les phrases suggérées au seul regard posé dessus. Il peut en surgir une histoire, un chant.  La mer et les bois ajoutent à la consistance du motif : une promenade aérienne. L’automne prégnant suffit à m’abstraire dans les chromatismes et les harmoniques que mer et montagne font entendre grâce au ressort des cuivres, des cordes. La page devient progressivement le support de leur concert.

       La promenade devient, outre le motif, le mode d’inspiration et d’orchestration du moment. L’écriture pourvoyant aux sons et aux couleurs à tel degré de mon abnégation nécessaire, je m’emploie seulement à observer, laissant l’essor créatif à la plume, qui disparut dès l’abord dans l’air pour enfin me reparaître à bord d’un nuage ; lequel prit la forme de la page. Elle venait des hauts sous l’ordre de la voix maîtresse qui dicta les notes et les mouvements. Obligé, quant à moi, devant telle dynamique, mon observation évolua en un salut votif. Considérant la gravité des sons et des sens que la plume disposa sur le nuage, je m’épris de la musique en lecteur. Le nuage imprégna par conséquent la page, prit soudain l’apparence du joyau que mer et montagne représentent à titre d’éléments fondateurs, moi recevant le joyau à titre d’hôte honoré. Et le joyau était un bouquet floral conçu par la voix des hauts.

 

 

 

SUR LES QUAIS

 

               Où je ne suis pas. Mais dans une sûre observation depuis ma demeure, de cette promenade céleste, précisément la cavalcade. Les yeux dessus les rythmes. Je suis en effet par la vision, ce de manière exclusive, auprès. Il s’agit d’un motif dont le caractère indispensable, quant à mon vœu de composition, se situe à une distance très respectable, celui des nuages qui passent au gré de la saison et du moment. Formée selon les structures diverses, leur promenade, il n’est pas faux de considérer telle écriture inspirée à ce sentiment de leur mélodie grâcieuse, ce poème que je fais en l’occurrence, comme mimétique. De fait, mimesis implique que la marge créative s’avère immense.

             Aujourd’hui, l’évanescence du motif, par son unicité, propose à mon regard des formes d’accentuation que je ne connais pas, sur fond bleu saphir. Il est vrai, l’air est nouveau. Le matin respire d’une lumière idéale et propice à la fabrique des mélodies. Où je ne sais pas, mais sis dedans ma demeure, apprenant. Ce ciel ! Présent toujours, à jamais, qui institue la beauté, fonde l’essor et la prosodie. Le ciel ! Absolue raison où je me tiens, qui me tient. Où je ne résiste pas. Mais sachant me quitter au profit du langage. J’écris, où je n’apparais pas. Le lieu, ma demeure dans quoi je ne suis pas. Mais versé dans la promenade des notes suggérées par la cavalcade aérienne, évanescente, émettant des phrases. Où je suis, à savoir dans l’air induit, écrivant.

                 Je n’ignore pas le phénomène mimétique de la variation inspirée grâce à la marche incessante des formes vaporeuses consacrées nuages. M’obligeant à telle prosodie du moment. Formant le vœu de m’abstenir de toute interprétation autre que la lecture sensorielle et sachant le réaliser par l’abnégation à quoi je tiens, comme la raison me tient. Au-delà, ce peut être alors une prosodie. Où je découvre la liberté ; « – le terme m’apparaît dans ses limites significatives toutefois, par bonheur, associable strictement au motif, celui de la promenade des nuages, où nous sommes », m’est-il répondu sévèrement ; « ainsi que la page,  associable à un nuage,  nous reçoit », m’est-il à nouveau répondu sévèrement. Je ne suis pas seul, non. Car l’Humanité est le Chœur. « – Nous nous rendons à la raison de la beauté prégnante, véritable, que dispense le moment, n’adhérant qu’au Bien Fondamental. Une mélodie. L’air que nous respirons. Des chants. Des hymnes. Nous. »

RÉFLEXION D’UN GRAVEUR

 

           Situé dans une progression qui peut être d’ordre thématique. Comme rédigeant. Une demeure. Où je côtoie des intelligences sûres auprès desquelles j’apprends. Chaque jour participe de mon éducation. Ne jubilant qu’à raison. J’écoute et ne me perds ainsi pas dans les vastes couloirs constitutifs du gros œuvre. Les silences complémentaires des harmoniques ou des chromatismes vont à la mélodie quotidienne. Il est des schèmes qui fixent obligatoirement mon attention ; je n’en connais les auteurs que grâce à leurs styles respectifs. À tel étage, ce sont des repères affichés sur les murs marmoréens, ce que l’on nomma symboles.

             Une maison grande, notable grâce à une histoire dont je ne sais que les armoiries. Je ne me pique en rien d’y vivre mais actant de la sorte, comme rédigeant, néanmoins d’après les techniques qu’exige l’art auquel je souscrivis, j’apprends davantage à me connaître. « Ce peut être conséquent » affirment les sages. Je vis mieux en effet depuis que je ne m’étudie plus. J’apprends simplement à être en la demeure, ne m’interrogeant sur personne ni sur la joie raisonnable dont chacune et chacun est le communicant. La peur qui fut longtemps ma blessure s’avère désormais transmuée en occupations rationnelles qui s’organisent autour de l’écriture. Je grave.

               Par extension, mon langage, celui que j’appris dès mon plus jeune âge, s’inscrit dans le cadre du service, de droit, que je rends à la demeure. La seule voie qui m’oblige est l’art. Il m’arrive de n’en considérer que la teneur en observant au-dehors les formes multiples des nuages, leur promenade mélodieuse, grâcieuse. Et selon leur avancée dans le temps que les nuages proposent, à proportion le silence se réalise tandis que je contemple, considérant ce bien-être où je suis alors tel un ancrage idéal entre nos murs. Je m’abstiens de tout commentaire, de toute interprétation, si ce n’est par ce genre d’écrit qu’est la gravure. Narration symbolique, la gravure éclaire des histoires, ou les illustre. L’épaisseur formidable de nos murs les contiennent à l’instar d’une composition florale. Je ne dis rien et me situe en la demeure dans la totale absorption de cette pratique des couleurs, de leur harmonie, proprement musicale. Des chants dans l’air, à l’image de ces allées hautes des nuées, étayent les notes et les nuances qui tantôt amplifieront le support de verre, de bois ou de métal. Forts de l’aloi que j’aurai conçu, ce seront des personnages inscrits dans l’ouverture qui donne sur ces allées hautes, dont la mise en œuvre au demeurant m’oblige de lege lata. Et forgeant ces archétypes, l’ordre m’incombe de me soumettre à l’idée d’Humanité Glorieuse. Y pourvoit la lumière qu’un tel support accueille quand, à terme, je puis en faire la lecture simple.

 

 

PEINTURE DE SABLE

 

               Je suis ridicule et n’en ris pas. Il n’est que le ressort de la comédie pour me moquer de moi-même et rire. Disposé comme avec des feuilles d’or, le couchant me permet de me situer à cet égard, et l’Histoire. Qui suis-je ? Qui suis-je devant les siècles ? Ma considération face à cette problématique ne va qu’à ma taille de petit point dans un océan. Je pourrai être un grain de sable, ainsi la période d’existence qui me fut octroyée. Je me dois respectueusement à cette idée pour me sentir une appartenance à la plage et aux fonds qui la prolongent.

         Les horizons m’apprennent à demeurer digne, sans me focaliser excessivement sur ma situation personnelle. Grâce à certains poètes que je lis, le prédicat rejoindre est porté à ma connaissance. Ma considération va à ce terme évoquant la prise de conscience collective, l’empathie, les valeurs de justice et de fraternité. Dès lors, je me rends. Armes futiles de mon ego déposées, je puis gagner l’entente cordiale réunissant la plage, ou me laisser gagner par le sentiment de cohérence qui la fonda il y a des milliers d’années. Je relève d’un ordre immuable dont le temps est le vecteur.

                Assis sur cette plage à observer l’océan, j’établis de fait une comparaison relativiste favorisant tel poème : Tout est beau et le Soleil se couche dans ses draps d’océan. Bientôt les étoiles paraîtront, du croissant de Lune les lointains échos de lumière. L’or passe au saphir. L’air est une mélodie en couleurs. La lumière du jour est autre, de l’or fondu aux nuances d’un diadème bleu marine. Je suis aux ombres bleues l’adjuvant et de leur apparition portant témoignage, d’une écriture picturale qu’en l’occurrence mon tamis suggère conçue dans les limites du cercle, où je n’apparais pas, ni ne me distingue, humble reflet de ma perception du moment chromatique, soit vécu dans le cadre de sa phase transitoire, jusqu’aux scintillements des astres.

 

LE POÈME ET SON CADRE

 

            La convergence induite m’apprend. Ce sont des discours transparents que personne ne se fait défaut d’écouter, des mélodies dont la cohérence demeure occurrence de départs. Où l’on rejoint par la suite le bonheur de sa propre liberté. Ce sont des montagnes et la mer, au regard duquel paysage les volontés vont aux espaces créatifs. On peut y sentir les tableaux et les poèmes. Un laps de temps est un siège d’inspiration de fait, à la durée relative, pouvant s’étendre selon ; de quelques minutes à plusieurs années. Ces gens sont des artistes ou des artisans. Ils fabriquent pour offrir. On en recueille les fruits pour un nouveau départ.

            Écoutant telle mélodie, on pourra se rendre ainsi à un nouveau moment, une entente avec soi par exemple, ou une occupation à créer devant les montagnes et la mer, à sa fenêtre … S’abstraire de maints défauts de concentration s’avère lors pratique sublime et simple, eu égard à la réalité. Où le vecteur sensoriel mobilisé de la sorte sert l’instant. La logique apparaît du phénomène créatif, qu’être à soi implique l’abnégation, de quoi la convergence induite nous rend au motif ; soit à la dynamique fondamentale dudit phénomène. Pour ma part, pour l’heure, une promenade se propose à l’idée de poème, que rien ne m’empêche de lire. Ce sont des formes volantes dans l’air bleu ! … vers lesquelles souvent la plume s’en va. Le regard posé dessus cette allée des hauteurs, je m’en trouve mieux à me quitter pour les rejoindre sur le plan rythmique. Car les mots sont des notes. N’imaginant rien au sentiment que j’ai de la mélodie autour de laquelle se structure le poème, j’observe les nuances chromatiques, harmoniques. Néanmoins, je ne néglige pas du tout la voix qui réalise la parfaite cohérence du motif et de la prosodie, quant à elle. Elle dicta, cette voix, à la plume qui me revient du haut des montagnes sur un nuage, la plume qui plana au-dessus de la mer. Et non contente de séduire, de la voix tel fut le don que la plume sur un nuage m’offrit, le don que j’accueillis :

 

                                     N'attendant rien de vous, si ce n’est l’obligeance

                                     Je, voix stricte de la raison, vous tiens suspect

                                     De rêves où j’apparais en motif de stance

                                     Qui me va de droit, attendu votre respect.

                                     Mais soyez prudent à l’égard de vos poèmes

                                     Vu la rigueur qu’ils nécessitent de ma part,

                                     Vu le concept, égal à la teneur des gemmes,

                                     Que j’évoquai à la plume avant son départ.

 

 

LA TERRASSE DE MARBRE

 

         Rassuré quant à la saison, je me trouve bien en la demeure. Des airs parcourent mon habitat, j’ai le choix d’en saisir maintes notes qui me conduisent au poème. C’est un établissement prosodique où je n’entre pas mais que fonda l’instant. Sis devant, comme l’est ma demeure face à la plage et aux contreforts d’une chaîne de montagnes, ma posture ne tient qu’au regard que je posai dans l’air. L’instant fit le reste, s’agissant de l’essor de la plume, envolée aux structures diverses. Je lis les notes simplement où je me trouve bien, en la demeure. À voir les nuages au-dehors, cette posture me rend à la qualité du climat de la saison. Je parle franchement d’un moment privilégié où tous les bons souvenirs convergent.

           N'imaginant rien que ce qu’un instant proposa de la mélodie autour de laquelle gravitent les éléments d’une symphonie. Une pastorale de fait. La progression va à proportion du temps et de la mesure qu’une voix dicta à la plume sur son support de nuage. Les parfums des fleurs y sont concentrés selon tel procédé de création duquel jamais on ne me livra le secret. Il est le fruit de la voix qui dicta à la plume dès les origines. J’aime la vie ! C’est un jardin musical qui suggéra les absolus de parfum qu’ici la pastorale agréablement pressentie transmue en poème sur la page. Je ne m’en énorgueillis guère. Il est le seul fait de la saison. Y convergent les vecteurs sublimes, notes, silences, reliefs harmonieux conçus en termes de fragrances. Par les créateurs, honoré.

            Respirant à leurs figures idéales et néanmoins réelles, je me livre au don des chromatismes et des harmoniques, simplement, à ma place. Je n’envie personne. Je ne souhaite de mal à personne. Les fondamentaux me l’interdisent quoi qu’il en soit, ne m’autorisant qu’à la raison. Ainsi de ce paysage de montagnes et de mer dans lequel ma demeure s’inscrit. L’air qui la parcourt et la comble m’amena ce matin à considérer avec humilité ce que la sagesse de la plume rapporta sur son nuage, cristallisant sur la page en notes de jasmin et de myrrhe dont la voix d’or composa l’aloi singulier, m’orienta sitôt vers l’idée de pastorale. M’obligeant, de droit. À la terrasse de marbre tenu lors, grâce à l’assise que j’y trouvai, confortable, j’en fis une lecture silencieuse, quitte à me reprendre pour une meilleure accession à l’air et à l’opus. Du décor partie intégrante devenu soudain, je m’endormis à cet orchestre de nature, non sans la vigilance que mon poste à l’échauguette ordonne. Jusqu’à l’horizon perçu au travers. Quand regagner mon poste me fut enjoint.

 

OPÉRA D’HIVER

 

          Sans excès. C’est un équilibre. Les notes, de telle sorte que je ne les considère qu’à titre de joyaux, vont dans l’ordre souhaité par le compositeur, les interprètes … À bonne distance, soit à ce degré optimal me transmuant en figure d’air, je lis. Les interprètes proposent ici des voyages sous la neige qui m’accomplissent en aventurier ; j’écris. Globalement les voix et l’orchestre gravitent autour de ma place assise face à la scène. De raison, je me positionne d’abord en auditeur épris du climat pacifique induit, telle une embarcation voguant au gré du barreur fidèle au cap. Il en résulte le sillage, ce qu’à bon droit on peut nommer écriture. Facteur social, l’origine de l’écriture est dans l’air.

               Ainsi posé mon regard dans la paix de l’écoute, il s’ensuit la présence aux rythmes des voix et de l’orchestre, sur le mode de la fusion symbolique. Je me situe, autrement dit, dans la chorégraphie des signes, participant de l’écriture scénique et, à ce titre, identifié à un style entre tous, respectueux, attentifs. Moi-même respirant à la générosité des styles et à leur excellence en ce lieu privilégié de l’art et de la culture. Je me laisse aller au bonheur de voguer vers le cap fixé par le barreur. Je me rends à ses paysages et ma reddition se réalise heureusement.

                 Je vois les horizons bleus, les régions qu’ils abritent. Ce sont les nuances chromatiques de l’azur. Je suis à l’aigue-marine, je suis au saphir, et m’endors dans le confort onirique que l’harmonie institutionnelle présente, comme clapotant à l’ancre jetée. J’entre dedans la phase très apaisante où se côtoient les grands personnages, les voix majestueuses, les rythmes de la virtuosité véritable. Au matin de rose éclos, je partirai. Pour l’heure, nous sommes à la nuit fastueuse, à la chorégraphie douce des signes d’air, des signes d’eau, au bercement de l’eau illuminée par les astres et les constellations. Au motif d’une tempête se conjugue celui de la mer étale. Voilà la magie du contrepoint : on dirait que les voix sourient ! Et rien n’outrepasse l’économie de l’intrigue et de sa mise en scène, si ce n’est parfois notre admiration. J’entends les premiers applaudissements, les murmures de satisfaction tandis que le livre toujours ouvert face à nous oblige encore au silence du dénouement, augmenté grâce à la vertu aurifère d’une sourdine aurorale … avant que ne s’accomplisse la merveille. Les acclamations, la sortie sous la neige, le sentiment des voyages lointains, les silences ravissants portés encor par les voix.

 

 

 

NOTES AUTOUR

 

            Le temps se résout en cet instant d’harmonies, de fait un espace musical qui fonde telle progression d’ordre poétique, où je n’apparais en rien. Soit une demeure dans laquelle je vis, dont l’air est comblé de fragrances en constant équilibre à l’égal des proportions florales d’un absolu de parfum, les musiques que j’y écoute font des notes qui en intensifient l’agréable effet. Je conçois par là même ma demeure comme une scène d’opéra où dansent en duo la note florale et la note de musique. Il y règne ainsi un spectacle renouvelé, celui de la chorégraphie de l’air, à quoi la plume, seule à le percevoir, en rend compte à la page sur le mode de la progression qu’à ma fenêtre je puis constater observant le ciel au-delà des montagnes et de la mer, à savoir celle des nuages qui se promènent dans l’atmosphère paisible, la progression musicale du poème.

            On peut y rencontrer de multiples variations autour d’un thème que je nomme « L’Amour de la vie et de notre planète Terre ». Tout y est sincère et tout y est beau, attendu ce que la plume, venue sur un nuage, prouve in concreto. Cristallisant lors sur la page les notes perçues, qui sont les notes florales et les notes de musique dansant dans l’air de ma demeure et que le nuage devenu page, au bercement de la plume, transmet sous la forme d’un nouveau bouquet où l’inspiration choisit la dominante de telle fleur, aujourd’hui la rose, je lis la prosodie qu’une voix qualifiée d’or, à raison, leur suggéra. Je me figure un pot de miel. Et voici ce que l’inspiration sise aux trônes du palais des hauts m’adressa par-delà les montagnes, la mer et ses plages, en la personne que la grâce institua Muse :

                                     Vous sachant l’observateur du bel hiver digne,

                                     De ses variations musicales, de ses fleurs,

                                     Recevez de moi ce qu’à la plume j’assigne ;

                                     Un poème, composé parmi mes huit Sœurs.

                                    Apparu d’après les rythmes d’une balade,

                                    Celle que suggère des nuages le cours,

                                    Je pensai vous offrir l’idée de la ballade

                                    Dans ces notes, perçues à la voix des Amours.

 

 

 

CONTÉE EN HIVER

 

        Vraiment non. Je ne sais pas. La demeure où je réside m’octroie ce fait. N’être qu’à l’écriture le simple lecteur. Concevant grâce à l’écriture la liberté d’être, en lecteur. Tout m’oblige ainsi par ma posture-là. Moi-même pris à la syntaxe, à sa mesure. Où les harmonies multiples élaborant l’aventure parmi des paysages me mènent au bien-être. J’y suis. Dès lors que j’ouvre le livre, dès la première page, je suis rendu à la fable, comme transporté en temps et lieux. Certes, il se peut que les rythmes m’y situent quand ma demeure semble devenir le cadre spatio-temporel où je me sens, au fil des pages, presque participant de l’action, presque un actant. Néanmoins le point de vue est toujours celui de moi lecteur, donc distant, avec raison.

          C’est une histoire avec des personnages et selon le genre, les lois du genre, ma distance est égale. L’auteur, l’éditeur, ont su l’établir, mettant d’abord en avant, sous la forme d’un avertissement, qui peut être un avant-propos, le projet. Auquel je ne me heurterai jamais, tel projet narratif, poétique, dramatique, argumentatif, par extension, artistique. J’en considérerai toujours l’intention sans négligence et pour mon bien-être. L’idée du loisir m’importe à ce titre, grandement. Car la lecture oblige et ne se départit pas de cette idée. Apprendre, grâce au choix culturel, artistique, du reste conséquent, que notre époque permet. Grâce au choix, porté en avant de moi-même afin de me laisser transporter syntaxiquement, idéalement, vers.

           Ou bien conduit de la sorte sur l’assise de mon bien-être. Y demeurer grâce au choix. Il se réalise un procès, par le phénomène de l’induction, constitutif de l’œuvre. J’en suis le témoin satisfait, inconnu et ledit procès m’instruit. La démarche, non anodine, me grandit et me garde à ma place, la place assise que j’occupe en ma demeure. Je connaîtrai à la lecture les phases d’admiration attendu le sens et l’harmonie des phrases, je connaîtrai leur repos complémentaire, aux constantes et à leurs contrepoints significatifs, édifiants, pacifiant. Au choix de l’auteur, non anodin, ce qui fonde le style, je serai présent aux variations et au thème. Il régnera le silence, la clef de l’inspiration. Je serai et demeure épris de la majesté du regard que posa la déesse olympienne sur le livre.

 

 

LA MUSE ET LE POÈTE TISSERAND

         Parmi les correspondances, je créai une saisie. Tout n’étant qu’un ensemble de notes sur toutes les portées musicales de la joie dont ma demeure est au comble, il m’apparut selon la clef telles phrases. De la hauteur et de la durée de chaque note, je tissai autour. Ce fut d’abord la mélodie au-devant de quoi je me rendis, fondée sur trois notes. Et le thème se fit jour, se poursuivit comme par cercles concentriques, grandissant à la manière du phénomène de la centrifugation ; ce que lors je nommai « variations ». Saisissant, grâce à l’écoute attentive des hauteurs et des durées, je posai un simple regard ensuite dessus la page où cristallisa le cercle définitif appelé poème. J’entendis les couleurs et les fragrances que l’orchestre ambiant suggérait. La saisie ne put se comprendre qu’en termes de « correspondances spontanées bues à la source des voix ». Le cuivre, le bois et les cordes, pour être plus précis, convergeant grâce à leurs voix, je conçus mon assise au milieu d’elles sans du tout en interpréter la venue, mais par le vœu de transcrire ce que mon regard retenait en substance ; un poème donc.

           L’envol des notes, parfaitement organisé dès l’abord et parfumant l’air dont ma demeure se trouve comblée grâce aux danses en duo qu’y font l’expression des voix et celle des fleurs, me conduisit peu à peu à l’établissement d’un jardin circulaire sur la page. Il apparut sous la forme d’un nuage transportant un bouquet de notes de musique et de fragrances que la plume choisit dans les allées du ciel bleu, où se promènent tous les nuages, pareils aux fleurs de coton écloses sur leur branche. À l’autre envol, celui de la plume dès le matin, moi-même jouissant de la rêverie musicale que disposaient les notes dans l’air de ma demeure, le regard posé sur les correspondances entre les fleurs et les rythmes acoustiques, je formai une pensée vu le voyage par-delà la mer et les montagnes, une pensée non dénuée d’amour envers la déesse que l’essor de la plume jusqu’aux allées célestes parut justifier, attendu l’impression qu’il me fit d’un départ soudain comparable au coup de foudre. La plume se rendait aux nuées et m’en rapporta gracieusement le bouquet mélodieux que mon regard saisit à sa cristallisation sur la page.

 

                                        Vous trouvant de bon matin dévolu aux notes

                                        Comme pris à leurs combinaisons dès le jour

                                        Nouveau, j’utilise pour ma part les pelotes

                                        De nuages formulant au mieux votre amour.

                                        La musique qui vous porta vers leur promenade

                                        D’un regard inspiré désirant la saisie,

                                        Dans ma voix se transmua en cette ballade

                                        Libre ; voici donc mon tricot de fantaisie.

 

 

 

PANORAMA

 

             On ne forcera pas le destin, s’agissant du bien-être où vous êtes, où je suis. Puisqu’il s’accomplit. Me gardant auprès de lui contre tout risque de nous voir en rupture d’harmonie, je le suis et m’y trouve bien par conséquent. Car le destin est un ordre implacable dont je n’ai aucune connaissance. Je crois que le bonheur tient à cela, être à ces mouvements dont aucun ne nous appartient et qui sont la force du destin. Moi-même trop orgueilleux doit m’abstenir afin d’à l’abri demeurer, où considérant avec gravité cette part que le destin m’octroya par le fait de sa grâce, je me voue à son silence impérieux, musical.

             Montagnes et mer, au-delà de quoi mes pensées vont aux rythmes divers portant la plume, rythmes que l’air diffuse, sont à la mesure du poème dit. Je perçois lors des figures qui m’obligent et jamais ne me moque, craignant la foudre. Placide devenu très tôt à l’idée de respect, je conçois les bouquets de fleurs que montagnes et bord de mer proposent au regard du promeneur vigilant désireux d’offrir, d’agir pour le bien fondamental sur le terrain de la cohérence. Don n’ayant de sens que sur le degré de la générosité et de la sincérité, qui me contient puis m’efface. Ainsi j’entends les rythmes à titre de signes exclusifs du destin, me tenant toujours prêt à les recevoir sur le mode de la mosaïque des chromatismes et des harmoniques. Ainsi, ce que la plume me communique à quelque heure du jour ou de la nuit, écrit dessus un nuage. Ce bouquet prosodique. Et chaque signe est la cristallisation d’une note en une fragrance sublime.

 

                                             De ce poème dont je vous sais la personne

                                             Destinée, vous transmets la musique à des fins

                                             Heureuses et pour que rien en vous ne dissone

                                             À la lecture de son contour mélodique.

                                             Ma voix disposant la note et le vocable

                                             Selon l’ordonnance du rythme versifié,

                                             Je chante la vie, notre bien inestimable,

                                             Et ne compose qu’autour d’un tel signifié.

LA MAISON PRÈS DU RÛCHER

 

           Je suis bien en ma demeure, toute en transparences et parmi les airs musicaux qui la comblent. Je ne suis donc pas ailleurs qu’à cette orchestration douce se donnant lieu par les cuivres, les bois, les cordes, à l’image de la mosaïque des roches, des conifères, de la glace et des neiges, des fleurs et des mers, entre les murs de ma demeure. Où l’écriture, en guise de réfraction d’or, forme les reflets perçus grâce au bon sens, sur le mode prosodique. En parfaite cohérence avec l’idée de mon départ vers le merveilleux régional, je dis l’azur, la pierre, le château cathare, je dis la faune sauvage, le colza, le maïs, les tournesols et le blé, les animaux d’élevage, les forêts aussi, l’Histoire, les forges, la vigne ; je bâtis comme ici les gens cultivent, existent, simplement.

              Je cueille aux notes, en phrasés disposées, le fruit de la voix qui les joue, chœur et orchestre, tandis que la diva en augmente le relief jusqu’au degré sublime. Nos silences l’honorent. De fait, mon écoute rejoint la page par une sorte de transmutation relevant du phénomène spéculaire, moi-même résolu en l’un des participants du miroir qui se dessine sous mes yeux et se devant à la seule plume bienvenue des nuées hivernales au-delà, dont on sait qu’y siège l’inspiration.

           Et à cette heure du matin ou du soir, quand se réalise l’orchestration silencieuse dessus la page, la cohérence accomplie sera un poème. Il est le fait des heureuses convergences, de l’entente des musiciennes avec la mesure stricte qui me contient dans la multiplicité de ses rythmes ; et c’est un nuage d’harmonies idéales que voix et plume me présentent, le bouquet floral des champs régionaux, entre mers et montagnes enneigées, ce que l’on nomma mosaïque. À son dessin cohérent, la page s’anima des signes aériens transmis, ceux du procès de la musique entendue et reçue en la demeure. Ma page, dirait-on, est de cire devenue à l’idée des fragrances que la plume sur son nuage saisit dans l’air des montagnes et des mers, avant de revenir se poser en la demeure, telle l’abeille.

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