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Chroniques - essais
 

J'accepte la grande aventure d'être moi.

                                   Simone de Beauvoir, Cahiers de jeunesse. 

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La valeur d'un homme tient dans sa capacité à donner et non dans sa capacité à recevoir.

 

           Albert Einstein

ciel

Rafale French Navy Pilots - CHILLOUT 3. Un document YouTube.

Fréquenté de New York
Maison de luxe moderne
Un Discours relatif aux  limites de l'interprétation
Le 14 août 2020

Le Livre du discours décisif by Averroès(1997-03-13) Poche – 1 janvier 1997

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Ibn Rushd (Averroes) (1126—1198).
An Internet Encyclopedia of Philosophy doc.
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Dans cette oeuvre, Averroès propose de distinguer les limites de l'interprétation, notamment lorsqu'il s'agit d'aborder les textes sacrés.

Les textes sacrés méritent un respect maximum, déclare-t-il, et sont le fait des Anciens, des savants. Respect immense aussi est dû aux traducteurs et aux exégètes. L'exégèse est le fait des spécialistes, des experts de la démonstration et il est des passages dans ce genre qui invitent à la démonstration, confie Averroès ; d'autres, au contraire, qui doivent demeurer intacts, par le fait du sens obvie, sens intouchable, ne nécessitant, en d'autres termes, aucun ressort scientifique.

Enfin, Averroès recommande instamment de ne laisser ce travail d'exégèse qu'aux spécialistes, sous peine de faute d'interprétation ; l'objectif ultime, précisément, étant de ne pas interpréter, mais de n'user que des preuves de la démonstration, c'est-à-dire, de laisser le texte intact. Il s'agit d'une question grave qui ne doit pas occasionner les dérives ; une question qui concerne l'exégèse uniquement, impliquant une très grande responsabilité en matière de praxis et de conduite ainsi qu'une obéissance absolue à l'égard de la Lettre et de l'auteur. Le travail de l'éditeur de cet ouvrage, en l'occurrence, est à saluer, tant sur le plan de la traduction de Marc Geoffroy que sur le plan de la présentation d'Alain de Libera qui dit : Avec son double destin de maître et d'étranger, Averroès est le révélateur du mouvement d'inclusion / exclusion qui, "à sa source même", habite la rationalité européenne.

Détails sur le produit

  • Poche

  • Editeur : Flammarion (1997)

  • ASIN : B00OPL4GZ0

Savoir lâcher prise
Le 13 juin 2020
L'impermanence du cercle permanent (Français) Broché – 20 mai 2016
de Sebastien Espenan
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Sebastien Espenan invite le lecteur à partager les principes de bien-être nécessaires pour vivre de façon optimale le quotidien.

L’Impermanence du cercle permanent repose sur un concept qui s’organise autour de l’acceptation et de l’abnégation. L’acceptation des contingences, "des situations qui vont engendrer des émotions", écrit-il, et l’abnégation par la considération que, poursuit-il, "l’ego sera votre adversaire".

Mettre en pratique ce concept demande d’abord beaucoup de modestie, vertu majeure s’il en est, ensuite une prise de conscience de l’enseignement de cette œuvre, à savoir de « lâcher prise », un travail axé sur l’esprit et sur le corps. Une mise en pratique qui impose une discipline rigoureuse à chaque instant dans le cercle que représente notre psychisme et ce, face à la présence d’un autre cercle, celui des événements extérieurs. Pour ce faire, l’auteur propose la mimesis de l’eau.

"En conclusion, écrit Michelle Gué, professeure émérite ayant préfacé l’œuvre, ce livre est un ouvrage indispensable à toute personne souhaitant mieux vivre ses pensées et ses émotions, à les apprivoiser pour s’en faire des amies."

Détails sur le produit

  • Broché : 60 pages

  • Editeur : Vie (20 mai 2016)

  • Collection : OMN.VIE

  • Langue : Français

  • ISBN-10 : 3639868005

  • ISBN-13 : 978-3639868005

  • Dimensions du produit : 15 x 0,4 x 22 cm

Matérialisme et réalisme d'un propos nécessaire
Le 16 novembre 2019
Manifeste du Parti communiste Poche – 4 janvier 1999
de Karl Marx et Friedrich Engels ; traduction de Emile Bottigelli
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Composée au mois de janvier 1848, d'après Emile Bottigelli, le traducteur et préfacier de la présente édition, cette oeuvre de Marx et Engels propose un développement en quatre parties du concept de communisme. De nombreuses références à l'Histoire, notamment à l'Histoire Politique, jalonnent le propos, depuis l'Antiquité jusqu'à celle du XIXe siècle.

Les deux auteurs élaborent à cet égard une logique de contradiction au regard de la bourgeoisie et de son hégémonie sur le monde, ce depuis la fin de la féodalité. Cette logique doit se concevoir telle une dialectique humaniste qui ne peut s'entendre sans l'action ; une action de résistance et d'union à mener dans le monde, avec le souci de rendre au peuple, aux travailleurs, leurs droits les plus stricts en matière d'éducation, d'égalité et de justice, autant de valeurs que la République fonde.

Marx et Engels pensent et s'adressent aux ouvriers du monde, à la jeunesse, en l'occurrence : "Les ouvriers n'ont pas de patrie. On ne peut leur prendre ce qu'ils n'ont pas." Et la condition ouvrière et la condition féminine vont de pair dans l'argumentation du Manifeste. Marx et Engels soutiennent fermement que l'exploitation des femmes doit cesser, de même que l'exploitation des enfants ; ainsi : "Vous reprochez-nous de vouloir abolir l'exploitation des enfants par leurs parents ? Nous avouons ce crime. [...] Il va d'ailleurs de soi que l'abolition des rapports de production actuels fera disparaître aussi la communauté des femmes qui en résulte, c'est-à-dire la prostitution officielle et officieuse."


 

L'éducation, de fait, est au coeur du propos, les auteurs préconisent l'instruction pour tous et la fin de l'esclavage, un terme, "l'esclavage", utilisé dès l'ouverture, laquelle met en relation les partis bourgeois et prolétaires sur le mode de l'opposition et d'après le principe de lutte des classes : "Homme libre et esclave, patricien et plébéien, baron et serf, maître d'un corps de métier et compagnon, bref, oppresseurs et opprimés ont été en opposition constante."

Détails sur le produit

  • Poche : 224 pages

  • Editeur : Flammarion (4 janvier 1999)

  • Collection : Garnier Flammarion / Philosophie

  • Langue : Français

  • ISBN-10 : 2080710028

  • ISBN-13 : 978-2080710024

  • Dimensions du produit : 17,8 x 10,8 x 1,3 cm

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Au demeurant, le Manifeste du parti communiste peut se comprendre comme un appel, non seulement un appel à la résistance contre toute forme d'oppression mais aussi comme une écriture de la volonté en faveur de la liberté de l'individu et, par conséquent, des peuples du monde entier : "Le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous."Marx et Engels écrivent en historiens et philosophes, en pleine révolution industrielle. Ils invitent à une prise de conscience collective autour des dangers de l'exploitation de l'homme par l'homme en citant la mémoire de toutes les sociétés humaines, les dérives politiques préexistant depuis l'Antiquité et leurs conséquences désastreuses sur l'équilibre économique et social du monde. Une prise de conscience qui doit préparer l'avenir selon les valeurs de la Res Publica, valeurs d'égalité, de liberté, de justice et de fraternité pour chacun et pour tous.

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Une statue de Karl Marx. A document from the New York Times.

« Sont bonnes conséquemment toutes les choses qui apportent de la joie »

     Le 7 mars 2019

De la droite manière de vivre

Baruch Spinoza ; traduit du latin et annoté par Jules Prat ; postface Bernard Pautrat

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Le philosophe Baruch Spinoza propose dans cet opus extrait de la partie IV de l'Éthique, dont l'ensemble est traduit et assorti des notes de Jules Prat, un texte qui s'articule autour de plusieurs principes essentiels relatifs au bien vivre dans la société. Il est composé de trente-deux chapitres et complété par un appendice, selon un ordre parfaitement structuré et qui constitue un véritable guide de bonne conduite au lecteur.

S'agissant des principes d'amitié et de fraternité qui dominent le propos, l'auteur écrit : « LES ÂMES ET LES CORPS DE TOUS COMPOSENT COMME UNE SEULE ÂME ET UN SEUL CORPS. » Ajoutant que toute société humaine n'a pour fondement que la concorde entre les individus qui l'ont organisée, l'organise et l'administre : « Il n'est donc rien de plus utile à l'homme que l'homme. »

Toutefois, cette concorde peut sensiblement varier en raison des tensions, et des sentiments qui les occasionnent, d'un individu à l'autre par le fait d'une impuissance d'âme. Une impuissance qui peut être de plusieurs ordres et que Baruch Spinoza identifie à l'idée de péché ; à savoir, tout excès de comportement individuel et / ou collectif devant être condamné.

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Ainsi, lorsqu'il traite de l'homme orgueilleux et de l'homme abject : « L'abjection, écrit Spinoza, est le contraire de l'orgueil ; et cependant il n'est rien de plus voisin de l'orgueilleux que l'homme abject. »

Mais à chaque exemple de défaut cité et défini, avec toujours une extrême précision, se trouve la solution majeure : l'amour, l'amour de la Liberté en l'occurrence, intrinsèquement lié à la joie ; le sentiment et l'émotion par excellence qui génèrent tout comportement optimal, toute action généreuse. Deux faits d'âme qui servent un imaginaire adéquat à la réalité des choses et principalement à la vertu. Vertu que l'on ne peut disjoindre de la puissance, selon l'auteur. Il dit : « Par exemple, parmi les règles de la vie, nous avons posé qu'il faut vaincre la haine par l'amour, c'est-à-dire par la générosité, et non répondre à la haine par une haine réciproque. »

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IIllustration de Patrick Fontana

Détails sur le produit

  • Poids de l'article : 100 g

  • Broché : 112 pages

  • ISBN-13 : 979-1030408935

  • Dimensions du produit : 10.3 x 0.8 x 16.9 cm

  • Éditeur : Allia (3 mai 2018)

  • ASIN : B079VQ4T7Q

  • Langue : : Français

L'Histoire et les valeurs de l'ordre des samouraïs

18 juillet 2018

Bushidô : le code du samouraï 

Inazô Nitobe ; traduit de l'anglais par Véronique Gourdon

Cet ouvrage d'Inazô Nitobe, traduit par Véronique Gourdon, se compose de dix-sept chapitres traitant de la philosophie des samouraïs et de son influence sur les mœurs des Japonais, de génération en génération et, par-delà, de son rapport avec les valeurs de la civilisation occidentale. L'honneur et le devoir de loyauté sont les deux règles essentielles du Bushidô : « La fidélité et la foi jurées à son supérieur sont la marque distinctive des samouraïs », écrit Inazô Nitobe.

Somme toute, on peut retenir de ce livre qu'il s'organise autour du fondement de l'éducation et de la pratique martiale du samouraï, tout orienté vers le respect du code de la chevalerie et dont l'éthique a pour attribut le sabre : « Le Bushidô fit du sabre l'emblème de la puissance et de la prouesse des samouraïs. Lorsque Mahomet proclama que "le sabre est la clé du Ciel et de l'Enfer", il se faisait seulement l'écho d'un sentiment japonais. » On retrouve à cet égard dans l'ensemble des valeurs prônées, évoquées, par ce fameux code des samouraïs, celles du Coran mais aussi celles du christianisme, puisque les vertus de la foi, de la prudence, de la charité, par exemple, en constituent des références majeures, outre l'honneur et le devoir de loyauté.

Épée de samouraï

On note que l'âme du Japon est liée à la figure du samouraï et à celle de la fleur de cerisier, comme peuvent l'être les figures du chevalier chrétien et de la rose à celle du monde occidental : « Par de nombreuses voies, le Bushidô s'est infiltré depuis la classe sociale d'où elle tirait son origine, et a agi tel un levain au niveau des masses, fournissant une référence morale à l'ensemble du peuple. Les préceptes de la chevalerie, étant au départ la gloire d'une élite, sont devenus au fil du temps une aspiration et une inspiration pour la nation tout entière. »

Éditions : Guy Trédaniel

Date de parution : 10 novembre 2014. Nombre de pages : 95 p. Prix : 19,90 €. EAN 9782813207708

Image du Quai Branly (Exposition Samurai
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Ci-dessus, des images de l'exposition Samurai du Quai Branly, Paris 2012.

« Je ne désespère pas de pouvoir apprendre »

   3 novembre 2010

Discours de la méthode : Pour bien conduire sa raison, et chercher la vérité dans les sciences (1637)

René Descartes

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Six parties composent cette oeuvre clef de René Descartes, dans lesquelles le philosophe tend à rendre compte des raisons qui l'ont conduit à publier (« imprimer ») son discours, par le biais duquel il invite le lecteur à partager le regard qu'il porte sur son époque, à l'égard notamment des démarches scientifiques réalisées par ses contemporains et de la place qu'il y occupe en tant que scientifique, lui-même, et philosophe.

Dans la première partie, Descartes expose les principes de sa méthode pour parvenir à une meilleure connaissance du monde qui l'entoure et, par dessus tout, de soi-même (« Mais je ne craindrai pas de dire que je pense avoir eu beaucoup d'heur de m'être rencontré dès ma jeunesse en certains chemins qui m'ont conduit à des considérations et des maximes dont j'ai formé une méthode par laquelle il me semble que j'ai moyen d'augmenter par degré ma connaissance... ») Pour ce faire, il confie qu'il préfère la posture « de la défiance » à celle « de la présomption » dans sa quête de vérité, un choix qu'il ne doit qu'à lui-même et qui, au demeurant, lui donne entière satisfaction (« je ne laisse pas de recevoir une extrême satisfaction du progrès que je pense avoir déjà fait en la recherche de la vérité... »), même s'il reconnaît qu'il peut être sujet à commettre des erreurs (« Toutefois il se peut faire que je me trompe. ») Somme toute, Descartes déclare que la finalité de sa démarche n'est, quoi qu'il en soit, pas de dicter les principes d'une méthode d'ordre universel « pour bien conduire sa raison » mais d'exposer la dynamique de celle dont il se sert pour conduire la sienne (« mais seulement de faire voir en quelle sorte j'ai tâché de conduire la mienne. »)

La seconde partie de son discours rapporte comment le philosophe tire profit de son expérience des voyages et des relations qu'il entretient avec ses pairs dans les domaines de la science et de la philosophie, en s'attachant à ne retenir que « les sujets » qui se conçoivent clairement. L'analyse géométrique et algébrique demeure à cet égard, selon lui, un excellent moyen d'exercer ses sens et son imagination, un outil méthodique, de fait, qui permet d'ouvrir le processus de recherche aux autres champs de la science (« je me promettais de l'appliquer aussi utilement aux difficultés des autres sciences que j'avais fait à celles de l'algèbre. »)

La troisième partie est consacrée à l'établissement d'une morale que l'auteur reconnaît d'abord être valable pour lui-même (« je me formai une morale par provision qui ne consistait qu'en trois ou quatre maximes, dont je veux bien vous faire part. ») Il s'agit d'une « morale par provision », précise-t-il, c'est-à-dire d'une morale provisoire, dans l'attente de sa reconnaissance. En premier lieu, Descartes se fait une obligation « d'obéir aux lois et aux coutumes » de son pays. Sa seconde maxime lui recommande d'être ferme et résolu dans ses actions en se fondant sur des opinions non pas « douteuses » mais « très assurées ». Dans sa troisième maxime, il observe que la quête de vérité n'est réalisable qu'en améliorant la connaissance de soi-même (« m'accoutumer à croire qu'il n'y a rien qui soit entièrement en notre pouvoir que nos pensées. ») Enfin, Descartes conclut en constatant qu'il n'y a pas de meilleure occupation en ce qui le concerne que « d'employer toute ma vie à cultiver ma raison, et m'avancer autant que je pourrais en la connaissance de la vérité suivant la méthode que je m'étais prescrite. »

Dans la quatrième partie, l'auteur traite du doute métaphysique et de son rapport à Dieu. Ainsi, il reconnaît que dans la mesure où sa réflexion le conduit au constat de la difficulté qu'il éprouve à distinguer les « choses vraies » des fausses, ou vraisemblables, son être est imparfait, et qu'il en est un d'une nature parfaite au regard de laquelle celle du philosophe prend conscience de sa propre faiblesse (« Et ayant remarqué qu'il n'y a rien du tout en ceci, "je pense donc je suis", qui m'assure que je dis la vérité [...] je ne la pouvais tenir non plus de moi-même [...] par une nature qui fût véritablement plus parfaite que je n'étais, et même qui eût en soi toutes les perfections dont je pouvais avoir quelque idée, c'est-à-dire, pour m'expliquer en un mot, qui fût Dieu. »)

La cinquième partie, à cet égard, rend compte des observations scientifiques de Descartes qui tendent à démontrer l'existence de Dieu, en particulier dans les domaines de l'astronomie, de la physique et de l'anatomie (« une machine qui, ayant été faite des mains de Dieu, est incomparablement mieux ordonnée, et a en soi des mouvements plus admirables, qu'aucune de celles qui peuvent être inventées par les hommes. »)

Enfin, la sixième partie reprend sous forme synthétique les motifs qui exhortèrent l'auteur à écrire ce discours et à faire état, par là même, de son inquiétude concernant sa réception (« mais il est rarement arrivé qu'on m'ait objecté quelque chose que je n'eusse point du tout prévue, si ce n'est qu'elle fût fort éloignée de mon sujet : en sorte que je n'ai quasi jamais rencontré aucun censeur de mes opinions qui ne me semblât ou moins rigoureux ou moins équitable que moi-même. »)

Éditions : Flammarion. Collection : GF. Edition avec dossier n° 1091 

Date de parution : 31 août 2016. Nombre de pages : 191 p. Prix : 3,80 €. EAN 9782081390713

Présentation, notes, dossier, bibliographie mise à jour et chronologie par Laurence Renault

Une OEuvre phare de la sagesse

25 janvier 2010

Pensées percutantes : la sagesse du combattant philosophe

Bruce Lee ; traduit de l'anglais par Serge Mairet, Thierry Plée ; préface John Little

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Cet ouvrage de philosophie écrit par Bruce Lee se compose de huit parties, autant de sous-ensembles dans lesquels l'auteur véhicule son point de vue à propos des thèmes fondamentaux de l'art de penser et qui concernent la nature humaine dans ses rapports avec soi-même ainsi qu'avec son environnement social. Ainsi, Bruce Lee aborde maints sujets, qu'ils soient abstraits comme l'amour et la mort ou bien très ancrés dans le quotidien du métier d'acteur et d'artiste martial que l'auteur pratiqua en maître.

La première partie de cet opus est intitulée « Des principes fondamentaux », où Lee choisit de s'exprimer sur plusieurs concepts tels par exemple que la vie, l'existence, le temps, la réalité, les lois ou le néant. Sur la réalité, l'auteur propose de « se débarrasser de la poussière des préjugés » (« Grattez la poussière qui vous colle à la peau et laissez la réalité se révéler intrinsèquement, dans sa nudité, ce qui correspond au concept bouddhiste de vacuité. ») Il ajoute que « le conditionnement est un frein à la réalité » (« Nous n'arrivons pas à LA voir en tant que telle du fait de notre endoctrinement, pervers et tordu. ») ou considère que « le véritable "Ici et Maintenant" s'obtient en se soustrayant au défilement des pensées. Il ne peut être le produit d'une connaissance conceptuelle ou de la pensée [...] Le "réalisme" est le sens : posséder la liberté dans son sens premier, non limité aux attachements, aux isolations, aux vues partielles, aux complexités. »

Ci-contre, un portrait de Bruce Lee (Book-Node)

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La deuxième partie a pour titre « À propos de l'être humain » dans laquelle les notions d'esprit, de pensée, d'idées, de perception, de raison, d'émotion, entre autres, demeurent traitées. Sur l'émotion notamment, l'auteur écrit ceci : « Prenant conscience que mes émotions sont de nature à la fois positive et négative, je me forge des habitudes quotidiennes qui pourront m'encourager à développer les émotions positives et m'aider à convertir les émotions négatives en quelque action utile. » S'agissant de la pensée en outre : « Le véritable Ici et Maintenant représente la substance de la pensée et la pensée, à son tour, incarne la fonction du véritable Ici et Maintenant. Le Ici et Maintenant est immuable et pourtant son mouvement et sa fonction sont inépuisables. »

Dans la troisième partie, Lee invite son lecteur à s'intéresser aux questions existentielles telles par exemple que se marier, élever des enfants, l'éducation, l'enseignement, l'éthique, le racisme (« Fondamentalement, les caractéristiques humaines se retrouvent partout. Je ne veux pas l'exprimer à la manière de "comme l'a dit Confucius" mais "sous le ciel, il n'existe qu'une seule famille". »)

La quatrième partie a pour titre « Sur la réalisation des objectifs ». Les thèmes abordés sont, entre autres, le travail, la qualité, la motivation, l'argent, la célébrité, la flatterie.

La cinquième partie est consacrée à l'art et aux artistes, plus particulièrement à l'Art, à la réalisation cinématographique et au métier d'acteur.

Enfin, les trois dernières parties sont respectivement intitulées « De la libération individuelle », « L'être en devenir » et « De l'objectif dernier ou des principes finaux ». Bruce Lee, dans ce cadre, s'exprime notamment sur la Non pensée (Wu-Hsin) : « Le "non-voir" et la "non-pensée" n'équivalent pas à un renoncement mais bien à un accomplissement. Le fait de voir sans distinction de sujet ou d'objet s'apparente à la "pure vision". »

Pensées percutantes  est somme toute une oeuvre incontournable pour qui s'intéresse de près ou de loin à la philosophie et aux arts martiaux. Bruce Lee donne à voir ici ses qualités de philosophe émérite, conjuguées à celles du prodige du kung fu que le monde entier s'accorda très tôt, dès ses premiers combats, à reconnaître comme tel. De fait, la structure n'est pas sans évoquer, à la fois dans sa progression et dans la mise en page, celle des Pensées de Blaise Pascal. Bruce Lee compose des fragments que l'on peut légitimement considérer comme autant de miroirs angulaires du kaléidoscope de la vie, dont le pragmatisme et la fonction thérapeutique qui en découle naturellement ont un effet immédiat chez le lecteur qui entend y voir plus clairement en lui-même, au quotidien.

On peut noter enfin que la préfacière de cet ouvrage qui n'est autre que Linda Lee Cadwell, la conjointe de l'auteur, apporte des informations très éclairantes sur l'oeuvre exceptionnelle que fut la vie de Bruce Lee.

Détails sur le produit

  • Poche : 222 pages

  • Poids de l'article : 300 g

  • ISBN-10 : 2846172528

  • ISBN-13 : 978-2846172523

  • Dimensions du produit : 20.8 x 1.9 x 14.5 cm

  • Éditeur : Budo Editions (20 mai 2009)

  • Langue : : Français

Une œuvre critique majeure

2 octobre 2006

L'Œuvre ouverte

Umberto Eco ; traduit de l'italien par Chantal Roux de Bézieux, avec le concours d'André Boucourechliev

Cet ouvrage d'Umberto Eco se compose de six chapitres et d'une « Conclusion ».

En premier lieu, l'auteur développe le concept de poétique de l'œuvre ouverte selon lequel « toute œuvre d'art, alors même qu'elle est forme achevée et "close" dans sa perfection d'organisme exactement calibré, est "ouverte" au moins en ce qu'elle peut être interprétée de différentes façons sans que son irréductible singularité en soit altérée. » Prenant l'exemple de l'œuvre de Kafka, Eco souligne que « les interprétations existentialiste, théologique, clinique, psychanalytique des symboles kafkaïens n'épuisent chacune qu'une partie des possibilités de l'œuvre. Celle-ci demeure inépuisable et ouverte parce qu'ambiguë. » De même, il est un mode d' « ouverture » qui se caractérise chez Sartre par une polarité de l'infini et du fini, substituée au dualisme traditionnel de l'être et du paraître, polarité « qui situe l'infini au cœur même du fini » ajoute Eco, en concluant sur le fait que « chaque phénomène est dès lors "habité" par un certain pouvoir, "le pouvoir de se dérouler en une série d'apparitions réelles ou possibles." »

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Le second chapitre s'intitule « Analyse du langage poétique », dans lequel Eco définit ce langage non comme « une organisation de stimuli naturels comme le faisceau de photons qui excite la vue » mais comme « une organisation de stimuli réalisée par l'homme et, comme la forme artistique, un fait artificiel. »

Le langage est « ce qui fonde toute communication. » Le langage poétique contient un « halo d'ouverture » propre à toute phrase, un message qui est « plurivoque ».

Le chapitre trois a pour titre « Ouverture, information, communication » où l'auteur analyse la théorie de l'information en comparant entre autres le discours poétique et le discours informationnel.

Le quatrième chapitre a pour objet d'étude « L'Informel comme œuvre ouverte » où Eco soutient le fait que « l'Informel est ouvert parce qu'il constitue un "champ" de possibilités interprétatives, une configuration de stimuli dotée d'une indétermination fondamentale, parce qu'il propose une série de "lectures" constamment variables, parce qu'il est enfin structuré comme une constellation d'éléments qui se prêtent à diverses relations réciproques. » L'Informel est un terme propre à l'art pictural et se caractérise par la présence du mouvement.

Le cinquième chapitre s'attache à rendre compte de « l'expérience télévisuelle et de l'esthétique » et a pour titre « Le hasard et l'intrigue ». Ici Eco reproche à « l'esthétique télévisuelle » de manquer d'ouverture en raison de sa propension à vouloir satisfaire à tout prix « les exigences et les attentes du public ». En regard de quoi, Eco propose une forme nouvelle de prise de vue en direct qui mettrait l'accent sur « l'indétermination profonde des événements quotidiens. »

Enfin, le sixième et dernier chapitre, que composent trois sous-ensembles, s'intitule « De la "Somme" à "Finnegans Wake" » où Eco analyse les poétiques de James Joyce. Une phrase qui semble assez bien résumer cette dernière partie est celle-ci : « Ce qui est, chez saint Thomas, soumission à l'objet et à sa splendeur devient, chez Joyce, un procédé pour séparer l'objet de son contraste habituel, l'assujettir à de nouvelles lois, lui attribuer une splendeur et une valeur nouvelles par une vision créatrice. » À cela on peut ajouter la définition qu'Eco donne de l'épiphanie joycienne : il s'agit, au début de l'œuvre de Joyce, d' « une manière de voir le monde, et par conséquent d'un certain type d'expérience intellectuelle et émotive. » Ensuite l'épiphanie devient « une manière de retailler la réalité et de lui donner une forme nouvelle. » L'épiphanie apparaît comme l'apanage du poète, « celui qui, dans un moment de gêne, découvre l'âme profonde des choses ; mais il est également celui qui donne à cette âme une existence objective par le seul moyen du verbe poétique. L'épiphanie est à la fois une "découverte" du réel et sa "définition à travers le langage." »

Concernant Finnegans wake, Eco conclut en disant que ce livre « ne nous fournit plus aucun moyen d'avoir prise sur le monde » puisqu'il doit se concevoir moins comme « un traité de métaphysique » que comme « un traité de logique formelle. [...] L'univers attend notre définition , ajoute Eco : le livre nous fournit les instruments pour une définition de l'infinité des formes possibles de l'univers. Entre l'image du monde qu'il nous propose et le projet que nous pouvons former de nous mouvoir dans le monde, il n'y a plus aucun rapport. »

Ainsi, L'Œuvre ouverte d'Umberto Eco donne à voir le langage comme un ensemble de structures profondément ancrées dans l'aventure humaine et, pour cette raison, demeure un remarquable outil d'interprétation et de lecture du monde social et culturel où nous vivons, faisant prendre conscience au lecteur des limites et des rouages de celui-ci grâce à l'art et à la clairvoyance d'un auteur virtuose.

Éditions : Payot. Coll. "Petite bibliothèque Payot" n° 768

Date de parution : 8 septembre 2010. Nombre de pages : 123 p. Prix : 6,10 €. EAN 9782228905688

« Comme être de frontière, le moi veut faire la médiation entre le monde et le ça. »

      2 mars 2013

Le moi et le ça

Sigmund Freud ; traduit de l'allemand par Jean Laplanche ; préface d'Elise Pestre

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Cet ouvrage psychanalytique se compose de cinq chapitres préfacés par Élise Pestre, intitulés respectivement « Conscient et inconscient », « Le moi et le ça », « Le moi et le sur-moi (idéal du moi) », « Les deux espèces de pulsion » et « Les relations de dépendance du moi ».

Dès l'abord, Sigmund Freud établit les fondements de la psychanalyse par le constat d'une distinction sensible entre, d'une part, les phénomènes psychiques relevant du conscient et, d'autre part, ceux qui appartiennent à l'inconscient (« La division du psychique en conscient et inconscient est la présupposition fondamentale de la psychanalyse. ») Selon l'auteur, un tel fait s'avère être un outil de compréhension indispensable des cas de pathologie mentale auxquels il demeure confronté. Ces deux composantes peuvent se définir également comme l'état de conscience et celui du refoulement qui, d'après Freud, apparaît au regard de l'observation identifiable comme « une force » marquant une opposition à l'encontre de la première composante (« de telles représentations ne peuvent pas être conscientes parce qu'une certaine force s'y oppose, que sans cela elles pourraient devenir conscientes,... ») Chez le patient, cela se traduit par une attitude de « résistance » au travail de l'analyse (« la force qui a produit et maintenu le refoulement, nous affirmons qu'elle se manifeste à nous pendant le travail analytique sous forme de "résistance". »)

Ensuite, le discours s'ancre progressivement dans le constat innovant d'une configuration, ou d'une architecture, de l'appareil psychique, faisant état de la présence de trois instances : le moi, le ça et le sur-moi. En premier lieu, Freud s'attache à rendre compte de la complexité des relations qui sont susceptibles d'être entretenues entre le moi et le ça dans le cadre d'une structure systémique répartie sur trois plans différents : le conscient, qui répond à l'abréviation Cs, le préconscient (Pcs) et l'inconscient (Ics). À cet égard, le moi relèverait des deux premiers systèmes, conscient et préconscient, et le ça appartiendrait au système Ics, en d'autres termes à celui de l'inconscient (« Un individu, donc, est selon nous un ça psychique, inconnu et inconscient, à la surface duquel est posé le moi qui s'est développé à partir du système Pc comme de son noyau [...] Le moi n'est pas nettement séparé du ça, il fusionne avec lui dans sa partie inférieure. Mais le refoulé lui aussi se fond avec le ça, il n'est qu'une partie de celui-ci. Le refoulé n'est nettement séparé du moi que par les résistances du refoulement, tandis que par le ça il peut communiquer avec lui. ») Freud en déduit dès lors que le moi est directement lié au domaine de la perception, alors que le ça l'est à celui de la pulsion. L'épreuve de réalité serait de la sorte le fait du moi, durant laquelle il lui incombe la tâche d'asseoir son autorité sur la base du principe de réalité, au dépens du ça, qui se fonde quant à lui sur le principe de plaisir. Cet acte de résolution est résumé ainsi par l'auteur : « Il est facile de voir que le moi est la partie du ça qui a été modifiée sous l'influence directe du monde extérieur par l'intermédiaire du Pc-Cs, qu'il est en quelque sorte une continuation de la différenciation superficielle. Il s'efforce aussi de mettre en vigueur l'influence du monde extérieur sur le ça et ses desseins, et cherche à mettre le principe de réalité à la place du principe de plaisir qui règne sans limitation dans le ça. La perception joue pour le moi le rôle qui, dans le ça, échoit à la pulsion. »

Au terme de ce développement, Freud consacre un exposé à l'identification d'une troisième instance qu'il nomme le sur-moi ou idéal du moi, dont le rôle est tout aussi majeur que celui des deux premières susnommées, compliquant même, dans certains cas de névroses et, par extension, de pathologies psychiques, le rapport de l'individu à la réalité en un véritable chaos dominé par le sentiment de culpabilité et dont l'origine serait un processus infantile que Freud interprète comme « le complexe d'OEdipe », en l'occurrence non encore résolu à l'âge adulte (« Lorsque le moi a mal réussi à maîtriser le complexe d'OEdipe, l'investissement énergétique de celui-ci, qui trouve son origine dans le ça, va se réactiver dans la formation réactionnelle de l'idéal du moi. »)

Du reste, cet idéal du moi demeure une instance qui s'inscrit dans le système préconscient, plus éloigné que le moi de la conscience et assume, tel « un représentant du ça », le rôle de l'autorité et de la censure morale, pérennisant ainsi le rôle du père. Dans le contexte plus précis des relations qu'il peut entretenir avec le moi, l'auteur ajoute que : « Lorsque le moi se compare à son idéal, le jugement qu'il porte sur sa propre insuffisance engendre le sentiment d'humilité religieuse auquel le croyant en appelle dans sa ferveur nostalgique. Au cours du développement ultérieur, maîtres et autorités ont continué le rôle du père ; leurs ordres et leurs interdictions sont restés puissants dans le moi-idéal et, sous forme de "conscience morale", exercent désormais la censure morale. La tension entre les exigences de la conscience morale et les réalisations du moi est ressentie comme "sentiment de culpabilité". »

Éditions : Payot. Coll. "Petite bibliothèque Payot" n° 768

Date de parution : 8 septembre 2010. Nombre de pages : 123 p. Prix : 6,10 €. EAN 9782228905688

« La névrose obsessionnelle se sert copieusement de l'incertitude de la mémoire pour former ses symptômes. »

     17 novembre 2010

L'Homme aux rats : un cas de névrose obsessionnelle

Sigmund Freud ; traduit de l'allemand par Cédric Cohen-Skalli ; préface Jean Triol

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Dans cette oeuvre, Sigmund Freud choisit d'organiser son discours selon trois axes de réflexion respectivement intitulés « L'homme aux rats (Remarques sur un cas de névrose obsessionnelle) », « Éléments théoriques » et « Nouvelles remarques sur les psychonévroses de défense ».

Ainsi, l'auteur s'est en priorité attaché à rendre compte des différents points d'une analyse qu'il réalisa dès le 1er octobre 1907 d'après le cas présenté par un jeune juriste alors âgé de vingt-neuf ans, nommé Ernst Lanzer. L'observation de Freud parut en 1909. Dans la première partie de celle-ci, l'auteur décrit l'objet de la cure de Lanzer comme celui d'une souffrance matérialisée par un ensemble d'obsessions touchant « à la crainte qu'il arrive quelque chose à deux personnes qu'il aime beaucoup : son père et une dame qu'il vénère. » En outre, complète-t-il, « il dit ressentir des "impulsions compulsives", comme par exemple celle de se trancher la gorge avec un rasoir, et produit des "interdits" qui se rapportent également à des objets insignifiants. » Progressivement, le travail du psychanalyste va consister à éclairer la partie inconsciente de l'âme de son patient en la faisant « surgir » dans la partie consciente. À cet égard, il va être amené à constater, parmi les différents symptômes révélateurs de ce type de névrose, que son patient emploie de manière très récurrente un lexique où prédomine le mot « rat ».

Par ce biais, Freud déduit que Lanzer opère inconsciemment de multiples associations qui traduisent un fait délirant lié au processus du refoulé, dont l'origine se situe dans l'enfance (« Le châtiment des rats avait avant tout ravivé l'érotisme anal qui avait joué un grand rôle dans son enfance et s'était maintenu par la suite au moyen de l'irritation provoquée par les vers dont il eut à souffrir pendant des années. ») Plus précisément, Freud établit que la nature obsessionnelle de la névrose de Lanzer demeure étroitement liée à un « mécanisme de défense primaire », processus mis en oeuvre par le jeune enfant dès lors que le plaisir sexuel qu'il éprouve s'inscrit dans le cadre d'une passivité de sa part, en d'autres termes dans le cadre d'une situation où il est sujet ou objet d'un acte sexuel sans éprouver de sentiment de honte.

De fait, l'anecdote, aussi anodine soit-elle en apparence, du « châtiment des rats », rapportée par un capitaine au cours d'une discussion que Lanzer avait avec lui pendant un exercice militaire s'avère être selon Freud le principal élément déclencheur des craintes obsessionnelles de son patient ; craintes dont l'origine remonte à un épisode très reculé de son enfance où son père lui interdit de se masturber (« Le fait que l'histoire du châtiment des rats ait fait rejaillir chez notre patient toutes les impulsions de cruauté égoïste et sexuelle prématurément réprimées est attesté dans sa narration ultérieure des faits par sa propre description de la scène et par ses mimiques. »)

Des conséquences du processus de refoulement, Freud constate du reste, dans la dernière partie de son discours, qu'elles peuvent être très graves et concernent toutes les pathologies mentales, de l'hystérie jusqu'à la paranoïa, deux cas de maladie qui par ailleurs présentent des points communs avec celui de la névrose obsessionnelle. Freud s'exprime en termes d' « acte compulsif » dans son interprétation et construit une mise en relation des différents symptômes qui identifient chacun de ces trois types de maladie (« Les actes compulsifs, au fur et à mesure que la maladie se prolonge, se rapprochent toujours plus et toujours plus clairement d'actes sexuels infantiles du type de la masturbation [...] Il ne me reste plus qu'à mettre à profit les éclaircissements tirés de ce cas de paranoïa dans une comparaison de la paranoïa avec la névrose obsessionnelle. Dans l'une comme dans l'autre, il a été prouvé que le refoulement est le coeur du mécanisme psychique. Le refoulé est dans les deux cas une expérience sexuelle infantile. »)

Éditions : Payot. Coll. "Petite bibliothèque Payot" n° 762

Date de parution : 12 mai 2010. Nombre de pages : 190 p. Prix : 7,65 €. EAN 9782228905541

« Cependant, depuis que l'hypothèse mythologique se trouve rejetée, il est devenu nécessaire d'expliquer le rêve. »

     25 octobre 2010

Sur le rêve (Français) Poche – 24 octobre 1990
de Sigmund Freud

Cette oeuvre de Sigmund Freud se divise en treize parties, dans lesquelles l'auteur rapporte les fruits de diverses analyses réalisées d'après le témoignage de ses patients ou bien au regard de sa propre expérience de « rêveur ».

Il ressort ainsi que les rêves pourraient se distinguer en trois classes : d'abord, « les rêves du type infantile », puis ceux qui expriment un désir refoulé, enfin ceux qui sont « accompagnés d'une angoisse », ces deux dernières catégories étant, selon Freud, celles que connaît majoritairement la personne adulte.

En outre, le travail d'investigation de l'auteur sur la matière onirique, dans le cadre des liens incidents qu'elle est susceptible d'entretenir avec certaines affections psychiques, lui permet d'identifier « un contenu manifeste du rêve » et un contenu latent nommé aussi « les pensées latentes du rêve », pensées qui le conduisent à déduire que le processus onirique, ou ce qu'il définit comme « le travail du rêve », se fonde sur une triple dynamique, celle de la condensation, du déplacement (« quand on note un rêve et les pensées dont on retrouve une trace dans le rêve, on ne peut douter que le travail du rêve a réalisé en l'occurrence une compression ou "condensation" remarquables [...] pendant le travail du rêve, l'intensité psychique passe des pensées et représentations auxquelles elle convient légitimement à d'autres pensées et représentations qui, à mon sens, ne peuvent prétendre à une telle mise en valeur.

Au cours de ce processus que je nommerai "déplacement du rêve", je constate aussi que l'intensité psychique, l'importance ou le potentiel d'affect de certaines pensées, se transpose en vivacité sensorielle... ») et de la dramatisation (« Il reproduit une corrélation logique en tant que rapprochement dans le temps et l'espace. »)

Enfin, Freud s'attache à reconnaître que la symbolique des rêves demeure un langage essentiel en matière d'interprétation (« La symbolique du rêve conduit bien au-delà du rêve ; elle n'appartient pas en propre au rêve mais domine de la même manière la figuration dans les contes, les mythes et les légendes, dans les mots d'esprit et dans le folklore. Elle nous permet de suivre les relations intimes que le rêve entretient avec ces productions ; cependant, nous devons nous dire qu'elle n'est pas le fruit du travail du rêve, mais constitue une particularité - probablement de notre pensée inconsciente - qui fournit au travail du rêve le matériel qu'il utilise pour la condensation, le déplacement et la dramatisation. »)

Éditions : Gallimard. Coll. "Folio essais" n° 12. Paru précédemment sous le titre : Le Rêve et son interprétation

Date de parution : 1990. Nombre de pages : 190 p. Prix : 6,60 €. EAN 9782070325542

« Que toute philosophie soit toujours l'autobiographie et la confession (du corps) d'un philosophe »

2 mars 2013

Contre-histoire de la philosophie : Tome 1, Les sagesses antiques

Michel Onfray

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Dans ce premier tome de la « Contre-histoire de la philosophie », Michel Onfray se propose de présenter les thèses des philosophes de l'Antiquité qui furent à des degrés divers mis au ban, volontairement écartés, par les tenants de l'historiographie classique. À l'encontre de la pratique institutionnelle de l'enseignement qui domine encore de nos jours dans l'Université européenne sous l'égide de Platon, Onfray entend faire découvrir à ses lecteurs l'alternative d'une pensée faisant corps avec la réalité matérielle, une pensée où se concentrent les principes d'un véritable art de vivre en société autant qu'avec soi-même et leur praxis, applicable dans la vie de tous les jours ; une pensée, en somme, tout entière orientée vers la création de soi.

L'auteur actualise ainsi une galerie de philosophes qui inaugurèrent en leur temps cette alternative par un mode d'existence dévolu à leur seule volonté, à l'épanouissement et à l'affirmation de leur subjectivité sur le terrain de la connaissance de soi. Les noms de Leucippe, Démocrite, Hipparque, Anaxarque, Antiphon, Aristippe, Diogène, Philèbe, Eudoxe, Prodicos, Epicure, Philodème de Gadara, Lucrèce et Diogène d'OEnanda ouvrent chacun des chapitres constitutifs de cet essai et témoignent de la sorte de l'attention précieuse et particulière que Michel Onfray manifeste à l'égard de ces philosophes. Son exégèse de fait s'attache à mettre en exergue l'unicité de leur discours et de leur action et à en montrer l'efficacité à notre époque, dans la quotidienneté et les moeurs des individus qui la peuplent :

« Je propose l'histoire d'une philosophie qui ne se constitue pas contre le corps, malgré lui ou sans lui, mais avec lui [...] Que le corps soit "la grande raison" et que toute philosophie soit toujours l'autobiographie et la confession (du corps) d'un philosophe comme l'affirme Nietzsche dans Le gai savoir, voilà une vérité d'hier prometteuse pour demain... », écrit-il dans sa préface.

Les valeurs de l'hédonisme, de la célébration du corps, demeurent au coeur de l'argumentation de cet ensemble. Citant Leucippe, Démocrite ou encore Lucrèce, entre autres exemples, Onfray donne à voir de leur philosophie une vision du monde qui se fonde sur la structure atomique de tout corps et qui écarte radicalement les concepts de transcendance et d'idéal platonicien : « Dans le monde de Leucippe, dit-il, il n'existe que des atomes, du vide et des mouvements effectués par les premiers dans le second. Rien d'autre [...] Avec cette seule option, simple, claire et nette, Leucippe arrime les hommes au réel immanent et à sa seule dimension matérielle. » Adoptant le parti de l'immanence contre celui de la mythologie ou de l'affabulation religieuse, Onfray corrobore les arguments du discours scientifique destiné à promouvoir une phénoménologie atomiste de l'univers et ajoute qu'elle est à la source d'une morale de la joie : « La physique des atomes et le matérialisme des particules débouchent sur une éthique hédoniste, en l'occurrence une morale de la joie. »

S'agissant de Démocrite, l'auteur relève que sa philosophie repose sur cette même conception : « Sur le terrain philosophique, Démocrite reprend purement et simplement Leucippe : le réel se constitue d'atomes agencés dans le vide ; la causalité est immanente et matérielle ; il n'existe pas de raison divine ; tout passe, l'éternité est une fiction - ou alors seul le changement est éternel. »

Quant à Lucrèce, il le décrit comme un penseur soucieux de démystifier tout discours organisé autour de la thématique d'un ordre de l'univers régi par les dieux et appelant la croyance populaire. Décryptant le de Rerum Natura... sur le mode de l'analyse historique et sémiotique, Michel Onfray situe Lucrèce dans la lignée d'Epicure et en dresse le portrait, là aussi, d'un philosophe atomiste soutenant la thèse d'un « matérialisme vitaliste » : « La pensée du philosophe atomiste relève de cette sensibilité oxymorique : un matérialisme vitaliste [...] On ne l'ignore plus, Lucrèce réduit toute réalité à des atomes réunis et composés en mouvement dans le vide. » Enfin, dans un sous-ensemble qu'il intitule « Apprivoiser la mort », Michel Onfray développe l'idée que l'élan vital promu par Lucrèce cristallise autour de la position que recommande d'adopter ce dernier face à la mort et à sa pulsion afférente. Lucrèce affirme en effet que la mort, en tant que réalité indépassable, nécessite son acceptation et sa reconsidération : « La mort n'est pas une catastrophe, écrit Onfray, tout juste une opération atomique qui correspond à la fin des agencements qui constituaient un corps et une âme. » En revanche, l'amour-passion est une forme d'élan vital qu'il convient d'éviter car il conduit paradoxalement au déclin du sujet. Onfray s'exprime en termes de « pathologie amoureuse » pour le qualifier, eu égard à l'enseignement qu'en donne Lucrèce, et préconise « l'amitié amoureuse » : « Loin des violences brutales de l'amour-passion, conclut-il, l'amour naît dans ce cas d'un temps partagé, d'une construction. Leçon de Lucrèce : l'amour n'est pas donné, il se construit. »

Éditions : Le Livre de poche. Coll. "Biblio essais" n° 4410 

Date de parution : 6 juin 2007. Nombre de pages : 314 p. Prix : 7,90 €. EAN 9782253083849

Le christianisme revisité sous l'angle de la philosophie du Jardin

11 septembre 2012

Contre-histoire de la philosophie : Tome 2, Le Christianisme hédoniste

Michel Onfray

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Dans cet essai, Michel Onfray organise l'économie de son discours autour de trois temps. Le premier s'intitule : « La communion des saints hérétiques », le second : « Une clarté médiévale » et le troisième : « Le christianisme épicurien ».

Dès l'abord, dans son introduction, l'auteur établit une critique historique de la naissance du christianisme sur le mode d'une brève rétrospective accusant l'empereur Constantin et Paul de Tarse d'être les principaux responsables d'une croyance tout entière orientée vers le mépris du corps, la haine des femmes et de la science, et qui perdure à notre époque. À cet égard, Onfray n'hésite pas à comparer l'action paulinienne à un symptôme névrotique et choisit au cours des chapitres qui composent le présent ouvrage de mettre au jour plusieurs pensées alternatives qui sont nées et se sont développées dans le même temps que la religion officielle, empruntant chacune à des degrés divers aux philosophies d'Épicure ou de Lucrèce.

Aussi restitue-t-il dans son exégèse les principaux axes de réflexion qui fondent et animent les pensées des premières sectes gnostiques non reconnues par l'historiographie classique, que l'Église qualifia d'hérétiques et dont elle traita et condamna les adeptes comme tels, sans autre forme de procès, au bûcher le plus souvent.

Puis, son discours s'ancre dans la période médiévale et défend les philosophes du Libre-Esprit comme Walter de Hollande, Jean de Brno, Heilwige de Bratislava, Quintin Thierry, entre autres, appelés aussi les goliards, dont la plupart furent là encore condamnés à périr sur le bûcher de l'Inquisition. De ces penseurs, Onfray écrit ceci : « Épicure les inspire, la plupart l'ignorent probablement, quelques-uns peut-être... L'Église les combat : elle n'aime ni leur ironie, ni leur liberté d'esprit, pas plus leur vagabondage et leur mendicité. Au point que les goliards disparaissent au XIIIe siècle, victimes du zèle de leurs persécuteurs chrétiens. Le mot "goliard" sert dès lors à fustiger le trompeur, le railleur, avant de devenir, dans le langage judiciaire, synonyme de tenancier de maison close. »

Enfin, la dernière partie met en perspective les philosophies de quatre penseurs de la Renaissance que Michel Onfray s'est proposé d'inscrire dans le domaine du christianisme épicurien et, par là même, de réhabiliter aux yeux de son lectorat ; ce sont : Lorenzo Valla, Marsile Ficin, Érasme et Montaigne. « La Renaissance, écrit-il, expose autrement, de manière plus fluide, plus élégante, plus légère, plus agréable. Si j'osais, je dirais plus hédoniste... » De Montaigne, auquel il consacre un grand nombre de pages, Onfray dresse le portrait d'un philosophe majeur, allant même jusqu'à dire qu'il est l'inventeur de la philosophie française : « Montaigne invente la philosophie française : que seraient les libertins érudits sans lui ? Et Descartes sans les Libertins ? Ou Pascal, qui pille un nombre considérable de ses idées. Et Bossuet, Malebranche ? Et Rousseau : sa théorie de la nature, ses thèses sur le bon sauvage ou sur l'éducation ? Et Voltaire, Diderot et la philosophie des Lumières ? La dette à l'endroit des Essais est considérable... »

Éditions : Le Livre de poche. Coll. "Biblio essais" n° 4411 

Date de parution : 1er octobre 2008. Nombre de pages : 373 p. Prix : 7,60 €. EAN 9782253083856

Un éloge du baroque

9 novembre 2013

Contre-histoire de la philosophie : Tome 3, Les libertins baroques

Michel Onfray

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Dans ce troisième volet de sa Contre-histoire de la philosophie, Michel Onfray organise son discours autour de la critique du Grand Siècle, qu'il focalise essentiellement sur les auteurs baroques, plus précisément sur les libertins baroques. L'exégèse est construite en deux temps. D'abord, Onfray traite des libertins fidéistes tels Charron, La Mothe Le Vayer, Saint-Évremond et Gassendi ; ensuite, des libertins panthéistes tels Cyrano de Bergerac et Spinoza.

Reprenant à son compte les propos de Michelet qui préfère qualifier de « Grand » le XVIIIe siècle plutôt que le XVIIe, Onfray confie que le XVIIe siècle mérite ce qualificatif surtout pour la place qui y est accordée au catholicisme et à la monarchie, place majeure s'il en est, aux dépens de l'alternative baroque. L'auteur préfère donc s'en tenir à ses goûts personnels et suivre le mouvement de sa pensée qui s'oriente spontanément vers le défrichage du travail des libertins, encore trop ignorés de nos jours par les tenants de l'historiographie classique.

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Tout du long, Michel Onfray met en perspective l'esprit libertin dans ses rapports avec la philosophie du Jardin et sa diététique du plaisir : « Le libertin baroque, écrit-il à cet égard, traite le corps en complice pendant que la civilisation issue de la culture judéo-chrétienne pratique la haine paulinienne des corps, la détestation des désirs et des plaisirs, la déconsidération de la matière corporelle. »

Citant par exemple Gassendi, La Mothe Le Vayer ou encore Cyrano de Bergerac, il ajoute que le corps joue dans leur philosophie le rôle suprême. « Il s'agit, confirme-t-il, de donner le meilleur au corps pour en faire un partenaire. Car seul le corps permet de connaître. Un corps sensuel qui sent, goûte, touche, regarde, entend et informe un cerveau qui construit la réalité, fabrique des images, et produit des représentations. »

Au cours d'un passage très approfondi qu'il consacre aux libertins panthéistes, Onfray s'emploie à une analyse circonstanciée de l'oeuvre de Cyrano de Bergerac qu'il n'hésite pas à considérer comme un penseur de génie : « À la manière d'un Léonard de Vinci, ou plus tard d'un Jules Verne, écrit-il, il échafaude avec ses fantaisies les contours de notre réalité. » L'auteur des États et Empires de la Lune - Les États et Empires du Soleil est décrit comme un visionnaire et un artiste de l'anamorphose. Cyrano découvre en effet dans son oeuvre une autre réalité, dans un style d'où jaillit un théâtre philosophique où s'accordent la pulsion de vie et la matière du monde sur le mode de la logique psychophysiologique. Onfray écrit : « Rien d'immatériel ou d'irrationnel au royaume du philosophe, juste des enchaînements de causalités raisonnables et rationnelles : une logique psychophysiologique qui laisse entrevoir une prescience de la logique psychosomatique. D'où une option radicalement matérialiste, atomiste. Le réel se réduit à une combinaison de particules élémentaires, son agencement génère les apparitions diverses du Même. »

Enfin, s'agissant de Spinoza, Michel Onfray dresse de ce dernier le portrait élogieux d'un praticien de la joie. Son Éthique est, dit-il, « un édifice baroque ». L'esprit géométrique fonde l'ouvrage, contenant et révélant à la fois dans son ensemble de formules la lumière divine. Dieu, à titre de matière essentielle, y demeure traité sur le mode de la proposition et de la démonstration. « Quand l'Eglise baroque agit en réceptacle de la lumière divine, l'Éthique de Spinoza, loin de toute préoccupation de morale moralisatrice, décline un édifice destiné à recueillir la fameuse "lumière naturelle" chère au philosophe. » Et de conclure : « L'ouvrage est un monstre philosophique ».

Éditions : Le Livre de poche. Coll. "Biblio essais" n° 31265 

Date de parution : 25 février 2009. Nombre de pages : 314 p. Prix : 6,90 €. EAN 9782253084440

Théorie du corps amoureux : pour une érotique solaire

Michel Onfray

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Éditions : Le Livre de poche

Coll. "Biblio essais" n° 4314

Parution : 1er octobre 2007.

Nombre de pages : 254 p.

Prix : 6,40 €.

EAN 9782253943143

Cet essai philosophique de Michel Onfray s'organise autour de trois parties majeures dans lesquelles demeure proposée une théorie du corps amoureux conçue sur le mode de l'alternative au déni de la chair promu au rang de dogme par la pensée judéo-chrétienne. L'économie du discours invite à cet égard à mettre en perspective les philosophies antiques pour mieux saisir le sens de sa propre vie, d'un rapport à soi-même et à autrui revisité sous l'angle d'une généalogie du désir, de la logique du plaisir et de la réhabilitation du contrat épicurien.

La singularité du propos d'Onfray repose ici sur la dynamique du bestiaire. L'auteur disserte en l'occurrence sur la représentativité philosophique de nombre d'animaux mis en exergue par les penseurs de l'Antiquité tels que le carrelet, le poisson masturbateur, l'éléphant monogame, le pourceau épicurien ou encore l'abeille grégaire et en tire la substance de son argumentation ou, au contraire, de sa contre-argumentation en faveur d'un développement discursif tout entier orienté vers la célébration d'une érotique solaire. Reprenant tour à tour, à la façon d'un portraitiste, la teneur éthique et esthétique de chaque animal précité dans le cadre de son association étroite avec tel système de pensée, l'auteur élabore simultanément une analyse de leurs défauts et de leurs qualités et confie leur préférer la figure du hérisson célibataire ; une occasion pour lui de formuler son attachement à la liberté du corps et de l'esprit : « Or les auteurs de fables, amateurs d'animaux pour exprimer des types, des caractères, des tempéraments, devraient retenir le hérisson qui exprime au plus près les vertus de prudence, de prévoyance et de calcul hédoniste [...] Pour sa part, le hérisson refuse tout autant le mimétisme avec les parages que la violence du prédateur car il préfère une sagesse véritablement hédoniste : éviter le déplaisir, se mettre dans la position de n'avoir pas à subir le désagrément, s'installer dans la retraite ontologique. Ni disparaître, ni attaquer, mais se structurer en forteresse à partir d'un pli dans lequel il préserve son identité. »

En outre, Michel Onfray tient pour une éthique du plaisir qui se fonde sur l'égalitarisme et le consentement tels que le suggèrent Ovide dans L'art d'aimer et Épicure dans son contrat engageant la relation intersubjective sur la voie du respect de l'autre et de l'hospitalité érotique. L'auteur se réclame en effet de l'héritage de ces deux philosophes, prenant acte de leur détermination à promouvoir l'égalité entre les sexes et la pratique d'un Éros léger sous-tendu par les valeurs du féminisme : « Le libertinage dont je cherche les formes augurales chez Ovide trouve également une formule essentielle dans l'égalitarisme : antidote à la mysoginie judéo-chrétienne, il propose un féminisme débarrassé de ses scories inégalitaires [...] Contre l'impossible altruisme du genre chrétien - qui oblige à une relation inégalitaire où je suis moins que l'autre -, le défenseur du contrat hédoniste veut un commerce égalitaire et païen où autrui compte autant que moi, ni moins, ni plus. » Citant la poétesse Sappho, Onfray ajoute : « Sappho exprime l'évidence de l'entropie et l'inéluctabilité de la mort. De cette sapience tragique, elle induit une théorie du temps présent, de la vie entendue comme oeuvre d'art, du quotidien destiné à transfigurer le réel selon le principe des jubilations respectives. »

Enfin, manifestant sa volonté de pragmatisme et de vitalisme, l'auteur considère que toute philosophie est avant tout une pratique, une application de principes. La philosophie doit être la matière d'une expérience concrète de la vie qui sert le projet autobiographique et la réalisation de soi : « Je n'imagine pas la philosophie, dit-il, sans la vie philosophique, et la vie philosophique sans le roman autobiographique qui l'accompagne, la rend possible et témoigne de l'authenticité du projet. »

Fééries anatomiques : généalogie du corps faustien

Michel Onfray

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Cet essai de Michel Onfray se fonde sur la structure d'un discours qui s'organise autour de cinq parties respectivement intitulées : « Penser l'avènement : être », « Artificialiser l'événement : naître », « Déchristianiser la chair : vivre », « Dématérialiser le destin : exister » et « Affronter la mort : mourir ». L'auteur y met en exergue les arguments d'une thèse dont la problématique pourrait reposer sur les questions suivantes : Quel regard sur le corps posons-nous ? Comment défendre l'alternative d'une bio-éthique accordant à la subjectivité et à la conscience individuelle la primauté au regard de toute autre considération relevant moins, par ailleurs, d'une conception postmoderne de l'homme, au sens progressiste du terme, que d'une pensée encore très imprégnée d'évangélisme paulinien ? Quelle attitude adopter face au destin et à la fatalité de la mort ? Michel Onfray se propose d'y répondre en confiant dès l'abord que la pensée du suicide ne l'épargna pas quand sa compagne Marie-Claude, atteinte d'un cancer, faillit mourir : « Mon désir de vivre s'entamait petit à petit. Je voyais de moins en moins de raisons à continuer l'existence. »

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S'imposa alors à lui l'idée de disserter sur l'anatomie du corps humain eu égard au rapport étroit qu'un tel sujet entretient avec l'éthique. L'odyssée existentielle de l'être humain demeure analysée dans le présent ouvrage selon une praxis qui reprend ses différentes étapes, de la naissance à la mort. Onfray entend ainsi livrer au lecteur une opinion qui s'appuie sur des valeurs d'ordre hédoniste et utilitariste.

Des thèmes universels et d'actualité touchant à la médecine, la biologie et la philosophie tels que l'avortement, le vieillissement, l'euthanasie ou le suicide y font l'objet d'une grande attention de la part de l'auteur qui pourvoit ainsi à la matière d'une pensée tout entière orientée vers la célébration du « corps faustien » qu'il définit comme un corps qui s'appartient pleinement, en conscience, et non soumis aux contingences du divers ou du chaos, un corps en pleine possession de ses moyens, sujet avisé de ses qualités autant que de ses défauts, un corps somme toute vitaliste : « Le vitaliste pratique la connaissance par les gouffres, il pratique une épistémologie tremblante, il active une méthode moins langagière et théorique que corporelle et pragmatique [...] Le vitalisme se rebelle contre la toute-puissance de l'outil utile et affirme l'irréductibilité d'un principe vivant. » Onfray se prononce en faveur d'une vie totale et riche de l'énergie instantanée grâce à laquelle se construit le corps faustien : « Qu'est donc cette vie au centre des soucis du vitaliste ? Elle est efflorescence, fécondité, création, construction ; elle suppose le sang, la sève, le sperme ; elle préside aux germinations, aux productions ; elle transforme le grain en plante, la fleur en fruit ; elle fabrique le nécessaire pour que l'abondance, l'excès, la force et la dépense, l'emportent sur la rareté, le manque, la faiblesse et l'économie [...] elle travaille la chair, associe les organes dans un corps, maintient de conserve les organismes, transforme des matières en énergie à même de réparer les dommages de l'entropie. »

De fait, cette conception de l'existence parcourt l'ouvrage tout du long, y compris lorsque l'auteur aborde des questions aussi tragiques que l'euthanasie ou le suicide. À cet égard, Onfray tient pour une approche vitaliste de la mort volontaire. Tout individu qui manifeste le voeu d'en finir avec la vie est à considérer, selon lui, comme un individu responsable que l'on ne devrait pas juger et dont on devrait respecter les intentions de dernier acte. À l'encontre des partisans du commandement vaticanesque et de son corollaire, la méthode palliative, Onfray défend le suicide et l'euthanasie : « Suicide n'est pas homicide, écrit-il, les deux termes supposent deux sens séparés, deux acceptions distinctes. Donner la mort à un individu non consentant ou se l'infliger parce qu'on l'a décidé relèvent de deux logiques antinomiques : d'une part la négation de la liberté d'un tiers, d'autre part l'affirmation de la sienne sans dommage pour autrui. »

Enfin, poursuivant sa réflexion sur la base du pragmatisme vitaliste, l'auteur exhorte ses lecteurs à « affronter la mort », non pas du point de vue d'une fantasmagorie d'ordre obsessionnel mais de celui que donne Sigmund Freud, à savoir : celui de la pulsion. La symbolique freudienne fixe en effet la réalité de deux pulsions consubstancielles et complémentaires, celles de la vie et de la mort, Éros et Thanatos, présentes en tout individu. Onfray conclut à ce titre que : « La mort est consubstancielle à l'être. Elle n'apparaît jamais, sinon en même temps que lui. Elle n'est pas générée par autre chose que le fait d'exister [...] Aucun destin ne s'écrit en dehors de ce travail de l'être par Éros et Thanatos. Leur affrontement constitue l'équilibre ou le déséquilibre de chacun [...] Thanatos relève en chacun d'un donné biologique, certes, mais aussi d'une construction sociale sur laquelle un pouvoir des hommes semble possible. »

Éditions : Le Livre de poche. Coll. "Biblio essais" n° 4372 

Date de parution : 1er septembre 2009. Nombre de pages : 407 p. Prix : 7,10 €. EAN 9782253099277

« La leçon de Nietzsche émancipe »

20 novembre 2011

La Sagesse tragique : du bon usage de Nietzsche

Michel Onfray

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On doit dire du philosophe Michel Onfray qu'il rend son lecteur intelligent. En témoigne ici son analyse circonstanciée de la pensée nietzschéenne et le portrait qu'il dresse de l'auteur d'Ainsi parlait Zarathoustra. À cet égard, le discours d'Onfray s'organise autour de deux axes majeurs de réflexion respectivement intitulés : « Les orages négateurs » et « La grande santé ».

Dans le premier cas, Michel Onfray met en avant la valeur négative des systèmes de pensée qui fondent la rhétorique « civilisatrice », pour ne pas dire « colonisatrice », à partir de laquelle se sont construites et forgées les moeurs ou les règles de vie des sociétés occidentales depuis deux millénaires, et contre laquelle argumente le philosophe allemand, en particulier celle qui caractérise le christianisme et le socialisme en son temps. Dans le second cas, au contraire, il fait ressortir les idées inscrivant le propos de Friedrich Nietzsche dans la dynamique constructive d'une interprétation du monde et de soi-même qui se concentre sur la réalité de l'individu perçu comme un véhicule d'énergie vitale et d'instincts qu'il appartient à ce dernier de contrôler et de sublimer pour faire de soi-même « une oeuvre d'art », participant de la sorte des valeurs et des principes qui composent la nature du surhomme.

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Dans sa préface, Onfray confie avoir eu, dès son adolescence, une proximité avec la pensée nietzschéenne et tâche de s'en expliquer la raison après s'être demandé : « Pourquoi étais-je nietzschéen ? Comment l'étais-je ? »

Il y répond en s'avouant avoir été fidèle au philosophe allemand, d'aimer en lui « l'école d'énergie, la célébration de la force, le culte de la vigueur, la grande santé, le débordement vital : le consentement à la vie jaillissant partout sous la plume du penseur. » Onfray fut très tôt séduit par le pouvoir émancipateur du discours nietzschéen et prend à ce titre sa défense, sous la forme d'un plaidoyer contre les contempteurs de tous bords qui, sortant allègrement des limites de l'interprétation, pour le dire avec le vocabulaire d'Umberto Eco, firent de lui le précurseur de l'idéologie nazie. Onfray explique que pareille erreur fut en partie déterminée par la vile décision de la soeur du philosophe qui, après sa mort, s'en prit à ses oeuvres et en fit, dit Onfray, « un penseur récupérable par les camps les plus opposés aux siens : antisémites, pangermanistes, nationalistes et nazis. »

Au-delà de la polémique, l'auteur de La Sculpture de soi donne à voir du philosophe au marteau le sapeur de l'Occident, celui qui a philosophiquement mis en pièces ses fondements : « Nietzsche opère la première Révolution copernicienne digne de ce nom dans la métaphysique occidentale. Rien avant lui ne s'apparente à une telle frénésie de lucidité. » Au portrait du surhomme, qui suscita tant de dénigrements de la part des contemporains de Friedrich Nietzsche, Onfray apporte un éclairage édifiant qui met fin à tout abus d'ordre interprétatif : « Le surhomme, confirme-t-il, n'est donc pas ce fou furieux qui détruit et sème feu et batailles derrière lui. Il n'est pas un ferment de mort, ni l'ange de la décomposition [...] Au contraire, le cheminement du surhomme est familier des cimes et des solitudes, loin des rumeurs de ville et des passions grégaires. »

Nietzsche se révèle également dans cet essai comme le philosophe célébrant le corps dans sa complétude et ses potentialités, lesquelles confèrent à l'esprit sa nature aérienne, légère, et joyeuse : « Ivresse ou extase, retrouvailles du corps avec lui-même, réconciliation par-delà toutes les aliénations, le souci nietzschéen consiste à promouvoir Dionysos contre le Crucifié, la Vie contre la Mort. »

Il est enfin le philosophe qui fonde la modernité « un demi-siècle avant Freud ». En effet, Michel Onfray met en perspective les travaux de ces deux personnalités dans sa conclusion, disant que le philosophe allemand a souvent inspiré, voire influencé, Sigmund Freud dans nombre de ses analyses : « Nietzsche formule un demi-siècle avant Freud la mécanique contenue dans la seconde topique freudienne : le conflit entre un moi désireux d'expansion et un surmoi générateur de répression, puis l'origine du malaise existentiel dans cette antinomie. Nietzsche fonde résolument la modernité en prenant parti contre le surmoi, contre les instances mortifères cristallisées dans le social. C'est en cela que toute confiance en la Volonté de puissance peut être dite confiance - et vouloir - en une Volonté de jouissance. »

Éditions : Le Livre de poche. Collection : "Biblio essais" n° 4388

Date de parution : 15 mai 2008. Nombre de pages : 185 p. Prix : 6,90 €. EAN 9782253082811

« Freud propose donc un monde avec sa langue, il la parle. »

22 décembre 2011

Le Crépuscule d'une idole : l'affabulation freudienne

Michel Onfray

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Cet essai de Michel Onfray s'organise autour de cinq parties respectivement intitulées: « Symptomatologie. Déni soit qui mal y pense », « Généalogie. Le crâne de Freud enfant », « Méthodologie. Un château en Espagne », « Thaumaturgie. Les ressorts du divan » et « Idéologie. La révolution conservatrice » ; autant de sous-ensembles dans lesquels le philosophe se propose d'analyser la théorie freudienne en convoquant les sources historiques et le riche support bibliographique qu'exige un tel sujet. Plus précisément, Onfray écrit dans sa préface qu'il entend proposer « une psychobiographie nietzschéenne de Freud ».

Dès l'abord, il confie qu'il s'est intéressé très tôt, dès son adolescence, aux écrits du célèbre psychanalyste comme à ceux de Nietzsche ou de Marx : « il y eut donc, dit-il, trois coups de foudre philosophiques : L'antéchrist de Nietzsche, le Manifeste du Parti communiste de Marx et Trois essais sur la théorie sexuelle de Freud. Ces trois éclairs dans le ciel noir de mes années post-orphelinat ont allumé une ferveur dans laquelle je vis toujours. » Ce n'est que bien des années plus tard, en 2005 plus exactement, lors de la parution du Livre noir de la psychanalyse : Vivre, penser et aller mieux sans Freud, et au regard du tollé qui s'ensuivit, que la dynamique d'investigation d'Onfray débuta : « J'avais par exemple lu pis que pendre de ce livre sous la plume d'Elisabeth Roudinesco. Elle écrivait par exemple : "Freud y est traité de menteur, faussaire, plagiaire, dissimulateur, propagandiste, père incestueux." (L'Express, 5-14 septembre 2005) »

Après la lecture d'un tel ouvrage, le philosophe s'est dès lors minutieusement penché sur les « Correspondances » de Freud et les témoignages des personnes qui côtoyèrent régulièrement ce dernier, notamment celui de son employée de maison, Paula Fichtl, qui fut pendant cinquante-trois ans au service des Freud, recueilli et publié sous le titre « La Famille Freud au jour le jour » par Detlef Bertehlsen. De fait, la démarche de Michel Onfray est à la fois celle d'un historien et d'un sémioticien, dans la mesure où sa lecture apporte un double éclairage ; d'une part, sur la vie de Freud et, d'autre part, sur l'articulation et le sens de la pensée freudienne.

Il ressort de l'exégèse d'Onfray le portrait d'un homme, Sigmund Freud, adulé dès son plus jeune âge par sa mère, à laquelle il aurait consacré toute son existence, marqué également par l'obsession de la célébrité et, de ce fait, par l'inclination à extrapoler son cas au rang de doctrine universelle. Pour y parvenir, Freud aurait détruit ou encore falsifié les documents testimoniaux rendant compte de ses tâtonnements, de ses erreurs, participant de l'élaboration progressive de son oeuvre. On y découvre en outre un individu pris dans l'étau d'un véritable « roman familial » dont la trame très complexe demeure constitutive des schèmes majeurs, ou des topiques, de la psychanalyse : « De cette configuration familiale, subjective, personnelle, individuelle, Freud va, comme d'habitude, extraire des conclusions destinées à nourrir une théorie à prétention universelle. » Ainsi, le complexe d'OEdipe, le meurtre symbolique du père, deux notions fondamentales de la psychanalyse, seraient le fait des relations personnelles qu'entretenait le jeune Freud avec son cercle familial : « Il suffit que le père soit vieux, écrit Onfray, qu'il ait humilié son fils en prédisant qu'il ne ferait rien de bien, qu'il ait été le contraire d'un héros le jour d'une humiliation antisémite non vengée, qu'il ait infligé à son fils la blessure narcissique d'un petit frère, puis d'une petite soeur, dans ses toutes jeunes années, pour qu'on le punisse en l'imaginant trompé par son beau-fils, jeune, aussi fringant que sa mère, et qu'on théorise un jour pour l'humanité tout entière un "roman familial" devenu concept majeur de la psychanalyse... » Le parti pris scientifique contre la philosophie, et en particulier la philosophie de Nietzsche, est aussi une caractéristique de la personnalité de Freud, qui se définit lui-même comme un « conquistador » eu égard à ce domaine encore inexploré de la science que représente à ses yeux la psychanalyse et surtout aux motivations personnelles de l'homme qui verrait là une source non négligeable de profit : « Freud veut de l'argent et de la célébrité, il lui faut tailler la forêt en direction de cet eldorado. »

D'un autre point de vue, Michel Onfray déconstruit la pensée freudienne et remet en cause son étiologie sexuelle en alléguant sa dimension chimérique, qui repose principalement sur l'invention du schème de l'inconscient. Le philosophe s'interroge sur la validité d'un tel fait et, rapportant le propos de Freud qui le définit comme « le royaume de l'illogique », conclut à un ressort de la pensée magique, autrement dit à l'affabulation : « Puisqu'il s'occupe du royaume de l'illogique, il lui faut inventer une langue, un langage, un monde, un univers entier : une utopie conceptuelle, une atopie mentale, une uchronie verbale, et habiter cet imaginaire avec la candeur d'un enfant prenant ses désirs pour la réalité [...] Freud propose donc un monde avec sa langue, il la parle. »

Enfin, après avoir dépeint les dérives idéologiques qu'occasionna la théorie freudienne en son temps par le fait, entre autres, que le psychanalyste ne refusa pas de souscrire à la politique fasciste d'un Dollfuss ou d'un Mussolini, Michel Onfray nuance sa critique en reconnaissant que, malgré le nihilisme ontologique dont il fit preuve, Sigmund Freud est l'un des penseurs incontournables du XXe siècle, moins à décrier dans l'économie d'un discours dont la teneur est, quoi qu'en dise ce dernier, d'ordre philosophique, que dans son déni arbitraire conférant à la psychanalyse un statut scientifique, médical, sans lui reconnaître les qualités d'un art de la pensée reflétant a priori la pratique d'un langage de la subjectivité. Onfray se prononce à cet égard en faveur d'une critique de la psychanalyse telle qu'elle fut conçue par les tenants du freudo-marxisme et qui ont sa sympathie, à savoir : Wilhelm Reich, Erich Fromm et Herbert Marcuse ; mais également par des auteurs et philosophes comme Alain, Jaspers, Politzer, Sartre, Popper, Wittgenstein, Deleuze, Guattari, Derrida.

Éditions : Le Livre de poche n° 32309 

Date de parution : 31 août 2011. Nombre de pages : 637 p. Prix : 8,60 €. EAN 9782253157861

« Freud essentialise le monde, il le pense en platonicien, en kantien. »

29 décembre 2011

Apostille au Crépuscule

Michel Onfray

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Éditions : Le Livre de poche n° 32325 

Date de parution : 31 août 2011. Nombre de pages : 184 p.

Prix : 6,10 €. EAN 9782253162049

La finalité de ce nouvel essai du philosophe Michel Onfray tient dans la proposition de ce dernier d'offrir une lecture complémentaire à sa précédente critique de la théorie freudienne ayant pour titre Le Crépuscule d'une idole. Le terme éponyme d'« apostille » corrobore le sens et l'orientation d'un nouveau discours analytique que l'auteur, rapportant la définition étymologique du Littré, conçoit comme une « annotation en marge ou au bas d'un écrit », un mot, ajoute-t-il, procédant du bas latin qui signifie « explication, note ». Autrement dit, Michel Onfray désire, par le biais de cet ouvrage, apporter un supplément d'informations susceptible de répondre au tollé qui accueillit la parution du « Crépuscule d'une idole » et, par extension, d'éclairer son lectorat sur les principaux axes qui fondent la teneur non freudienne de sa réflexion. Il s'agit donc d'une synthèse dans laquelle Onfray récapitule le contenu de ses études sur la psychanalyse freudienne selon le mode de l'alternance entre chapitres impairs et pairs. Il s'en explique dans son avant-propos en écrivant que : « Les chapitres impairs résument ce qu'il faut savoir de Freud pour envisager les enjeux des chapitres pairs qui proposent des "pistes" pour une psychanalyse non freudienne - et non une "théorie globale" impossible à conduire par un homme seul. »

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Il ressort de l'originalité de cette dynamique discursive l'élaboration d'une lecture comparative entre, d'une part, la thèse freudienne et, d'autre part, les perspectives proposées par les tenants d'une psychanalyse non freudienne tels que Reich, Politzer, Sartre ou bien, plus loin dans le temps, au cinquième siècle avant l'ère commune, le philosophe trop méconnu Antiphon d'Athènes. Reprenant ainsi point par point les composantes de la psychanalyse de Freud qu'Onfray estime, pour nombre d'entre elles, sujettes à caution et contre lesquelles il argumente avec ferveur, ce dernier met au jour l'alternative que soumettent entre autres et en regard les penseurs susnommés.

Abordant par exemple la question de la thérapie, question cruciale s'il en est quant à la dimension pratique de la psychanalyse ou à son efficacité, Michel Onfray oppose la méthode de Freud, qu'il qualifie d'« incroyable capharnaüm », aux moyens mis en oeuvre par Georges Politzer en faveur de « la psychologie concrète » qui se définit comme une discipline fondée sur des valeurs d'ordre épicurien, réhabilitant la nature et la fonction de la parole au sens que lui attribue Lucrèce, à savoir celui de « molécule ». La parole est, de ce point de vue, « l'instrument d'une modification de l'être par des sons qui font sens ». C'est là, nous dit Onfray, la véritable mesure à conférer à la fonction thérapeutique de la parole : « Les épicuriens, souligne-t-il, parlent de simulacres pour expliquer le mouvement des atomes dans le monde. Il s'agit de duplications atomiques plus subtiles que leur source qui, grâce à leur plus grande subtilité, vont d'un point à un autre et pénètrent les trames matérielles d'un corps humain : fragments détachés d'un objet qui entrent dans l'âme matérielle par l'oeil, l'oreille, le nez et le corps, emmagasinent des informations atomiques, et l'intelligence, elle aussi matérielle, organise et réorganise. La psychanalyse non freudienne est un exercice spirituel atomique : un art de produire l'ordre du sens dans un chaos formel. »

Enfin, reconnaissant au regard d'un tel propos sa proximité avec la pensée sartrienne, Michel Onfray tient pour une psychanalyse existentielle, fondée par ailleurs sur la réalité d'« un inconscient neuronal a posteriori », et qui sache s'adapter à chaque cas, en d'autres termes au sujet en tant que porteur d'un « secret individuel » : « Sartre, écrit-il, critique chez Freud l'idée d'une symbolique universelle selon laquelle une chose trouverait toujours la même représentation sous toutes les latitudes existentielles - du genre : un parapluie = un phallus. Contre la raideur dogmatique de la psychanalyse freudienne, Sartre revendique la souplesse : il s'agit d'épouser "les moindres changements observables sur chaque sujet". Dès lors : "La méthode qui a servi pour un sujet ne pourra, de ce fait même, être employée pour un autre sujet ou pour le même sujet à une époque ultérieure." »

« Ce qui donne du goût à la vie est dans ce livre »

11 septembre 2012

Journal hédoniste : Tome 1, Le désir d'être un volcan

Michel Onfray

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Dans cet essai, Michel Onfray organise l'économie de son discours autour de trois temps. Le premier s'intitule : « La communion des saints hérétiques », le second : « Une clarté médiévale » et le troisième : « Le christianisme épicurien ».

Dès l'abord, dans son introduction, l'auteur établit une critique historique de la naissance du christianisme sur le mode d'une brève rétrospective accusant l'empereur Constantin et Paul de Tarse d'être les principaux responsables d'une croyance tout entière orientée vers le mépris du corps, la haine des femmes et de la science, et qui perdure à notre époque. À cet égard, Onfray n'hésite pas à comparer l'action paulinienne à un symptôme névrotique et choisit au cours des chapitres qui composent le présent ouvrage de mettre au jour plusieurs pensées alternatives qui sont nées et se sont développées dans le même temps que la religion officielle, empruntant chacune à des degrés divers aux philosophies d'Épicure ou de Lucrèce.

Aussi restitue-t-il dans son exégèse les principaux axes de réflexion qui fondent et animent les pensées des premières sectes gnostiques non reconnues par l'historiographie classique, que l'Église qualifia d'hérétiques et dont elle traita et condamna les adeptes comme tels, sans autre forme de procès, au bûcher le plus souvent.

Puis, son discours s'ancre dans la période médiévale et défend les philosophes du Libre-Esprit comme Walter de Hollande, Jean de Brno, Heilwige de Bratislava, Quintin Thierry, entre autres, appelés aussi les goliards, dont la plupart furent là encore condamnés à périr sur le bûcher de l'Inquisition. De ces penseurs, Onfray écrit ceci : « Épicure les inspire, la plupart l'ignorent probablement, quelques-uns peut-être... L'Église les combat : elle n'aime ni leur ironie, ni leur liberté d'esprit, pas plus leur vagabondage et leur mendicité. Au point que les goliards disparaissent au XIIIe siècle, victimes du zèle de leurs persécuteurs chrétiens. Le mot "goliard" sert dès lors à fustiger le trompeur, le railleur, avant de devenir, dans le langage judiciaire, synonyme de tenancier de maison close. »

Enfin, la dernière partie met en perspective les philosophies de quatre penseurs de la Renaissance que Michel Onfray s'est proposé d'inscrire dans le domaine du christianisme épicurien et, par là même, de réhabiliter aux yeux de son lectorat ; ce sont : Lorenzo Valla, Marsile Ficin, Érasme et Montaigne. « La Renaissance, écrit-il, expose autrement, de manière plus fluide, plus élégante, plus légère, plus agréable. Si j'osais, je dirais plus hédoniste... » De Montaigne, auquel il consacre un grand nombre de pages, Onfray dresse le portrait d'un philosophe majeur, allant même jusqu'à dire qu'il est l'inventeur de la philosophie française : « Montaigne invente la philosophie française : que seraient les libertins érudits sans lui ? Et Descartes sans les Libertins ? Ou Pascal, qui pille un nombre considérable de ses idées. Et Bossuet, Malebranche ? Et Rousseau : sa théorie de la nature, ses thèses sur le bon sauvage ou sur l'éducation ? Et Voltaire, Diderot et la philosophie des Lumières ? La dette à l'endroit des Essais est considérable... »

Éditions : Le Livre de poche. Coll. "Biblio essais" n° 4263

Date de parution : 1er novembre 2008. Nombre de pages : 508 p. Prix : 8,10 €. EAN 9782253942634

« Habiter le présent »

11 septembre 2012

Journal hédoniste : Tome 2, Les Vertus de la foudre

Michel Onfray

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Trente-deux fragments philosophiques composent ce second tome du journal hédoniste de Michel Onfray comme autant de variations sur le thème éponyme des vertus de la foudre, apanage de la pensée nietzschéenne que revendique l'auteur tout du long dans cette oeuvre : « Seul l'hédoniste, écrit-il, revendique la brutalité de la foudre et des éclairs, la force et la puissance des volcans, l'énergie des tremblements de terre et le lyrisme d'une vitalité débordante. »

Sa préface intitulée « Autobiographie de ma mère », propose déjà le climat de l'ouvrage : il prend la défense de ses parents dans une anecdote où il informe en particulier son lecteur que sa mère fut très tôt placée à l'Assistance Publique et qu'un jour, désirant retrouver l'identité de ses parents naturels, elle invita son fils à l'aider à reconstituer le puzzle de ses jeunes années en retournant avec lui dans les locaux administratifs de cette institution. La description qu'en fait l'auteur demeure sans concession : « Là où des chairs ont frémi, dit-il, des corps exulté, des vies exsudé, des violences percé, des douceurs ravi, l'alchimie bureaucratique génère des dossiers et réduit l'existentiel incarné à du papier pelure entrelardé de carbones épuisés, pâles et attachés par des trombones rouillés. Mon arbre généalogique plantait ses racines dans ces odeurs fades. » Fort de ses lectures d'adolescent à l'appétence marquée sensiblement pour les oeuvres de Friedrich Nietzsche, il ressort grandi de cette plongée dans le passé de sa mère : « Dans le silence et la vitesse, je songeais à cette phrase de Nietzsche qui enseigne que tout ce qui ne tue pas fortifie et à l'usage que j'en fais depuis ma première lecture, adolescent. »

De ce vaste ensemble on retient, somme toute, l'analyse pertinente que le philosophe fait de notre époque par le biais de nombreux sujets touchant aux domaines de l'art et de la culture. Ainsi, par exemple, lorsqu'il rend hommage à la musique de Pascal Dusapin dans « Bruits du pliage des nuages », ou à la peinture d'Otto Muehl dans « La philosophie dans le parloir ». Ainsi, quand il choisit de disserter sur l'envie et le ressentiment dans « Les hommes aux paupières cousues » en se fondant sur ses propres expériences d'auteur reconnu et célèbre confronté à un grand nombre de faux admirateurs ou de faux amis seulement animés par ce type de passions : « Il m'a fallu un temps fou pour savoir l'importance de l'envie dans les relations avec autrui. Et encore, je ne suis pas toujours sûr d'être véritablement affranchi sur ce sujet tant pullulent les malentendus qui font croire sincères des histoires écrites sous la rubrique des perversions, du ressentiment contenu, voire de la haine dissimulée, travestie [...] L'envie est passion d'impuissant. » Où l'on découvre enfin son admiration pour l'oeuvre de Michel de Montaigne dans « Considérations sur les rognons du philosophe » ; Montaigne qu'il qualifie moins d'hédoniste que d'eudémoniste, car il y a chez l'auteur des Essais moins de radicalisme qu'une volonté d' « habiter le présent », une forme de sagesse orientée vers la plénitude du moment, de l'instant, et marquée par le souci de l'économie : « Le volontarisme eudémoniste veut maîtriser le passé aussi bien que l'avenir en réduisant ces formes du temps au statut de fictions destinées à perturber ou réjouir l'instant. Et il opte pour la réjouissance. Montaigne excelle en maître du moment à vivre, dense et joyeux. »

Éditions : Le Livre de poche. Coll. "Biblio essais" n° 4291 

Date de parution : 1er mars 2000. Nombre de pages : 475 p. Prix : 7,60 €. EAN 9782253942917

Un appel à la raison

18 février 2011

Indignez-vous !

Stéphane Hessel ; postface Sylvie Crossman et Jean-Pierre Barou

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Stéphane Hessel développe ici un réquisitoire à l'encontre des politiques internationales menées durant les dernières décennies, en particulier depuis le début des années 1990, dans la pratique desquelles il observe une dérive des pouvoirs vers toujours plus d'inégalité en matière de partage des richesses mais aussi d'indignité au regard de la Déclaration des Droits de l'homme.

La finalité d'un tel discours réside dans l'intention de fournir aux jeunes générations des « motifs » de s'indigner comme autant de plaies à panser qui stigmatisent la société au sein de laquelle elles vivent - ou vivront. Hessel, de fait, exhorte la jeunesse à prendre acte du déclin des valeurs démocratiques qui semble gagner aussi bien l'État français qu'Israël et, par extension, l'ensemble des États membres de l'O.N.U. La prise de conscience doit ainsi concerner toute nation digne de ce titre, car aucune n'est exempte de s'abîmer dans le chaos totalitaire, ce au nom des acquis économiques et sociaux élaborés au sortir du second conflit mondial par le Conseil National de la Résistance, dont Hessel fut et demeure un haut responsable.

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Il revendique, à cet égard, le respect de la justice sociale et le retour à une balance économique équilibrée et stable : « pas cette société des sans-papiers, des expulsions, des soupçons à l'égard des immigrés, pas cette société où l'on remet en cause les retraites, les acquis de la Sécurité sociale, pas cette société où les médias sont entre les mains des nantis, toutes choses que nous aurions refusé de cautionner si nous avions été les véritables héritiers du Conseil National de la Résistance. » Dont acte.

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Ce faisant, l'auteur oppose au parti pris d'indifférence des États vis-à-vis des droits de l'homme une attitude non-violente mue par l'espérance, noble vertu en laquelle il voit la résolution des conflits et, par là même, le fondement de toute négociation viable :

Éditions : Indigène

Coll. "Ceux qui marchent contre le vent"

Date de parution : 7 décembre 2011

Nombre de pages : 32 p.

Prix : 3,10 €

EAN 9791090354203

« Je suis convaincu que l'avenir appartient à la non-violence, à la conciliation des cultures différentes [...] Dans la notion d'efficacité, il faut une espérance non-violente. S'il existe une espérance violente, c'est dans la poésie de Guillaume Apollinaire : "Que l'espérance est violente" ; pas en politique. »

King Kong théorie (2006)

Virginie Despentes

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Entrer dans le texte de Virginie Despentes, c'est écouter une sorte de rhapsodie aux variations multiples dont le leitmotiv serait le féminisme perçu sous l'angle de l'authentique révolution, d'une pensée qui, pour le dire comme André Breton, entend « renverser la vapeur » du machisme exacerbé autour duquel cristallise tout pouvoir, depuis la cellule familiale jusqu'au cercle de l'État.

Il s'agit bien, selon elle, de remettre en cause et de saper les fondements de la société pour enfin accorder à la femme son statut d'être libre et pensant, et laisser parler sa puissance de sujet maître de sa vie, de son destin et de son art à l'égal d'un Bruce Lee ou d'un Mohamed Ali. « Parfois, écrit-elle par exemple, c'est simple, j'ai l'impression d'être Bruce Lee. Quand il racontait dans les interviews que, tout le temps, des mecs venaient lui taper sur l'épaule pour le provoquer en duel. Ils voulaient montrer à tout le quartier qu'ils étaient tellement forts, ils s'étaient fait Bruce Lee. »

L'auteur se définit ainsi comme une King Kong Girl et revendique sa part de masculinité, indispensable à l'accomplissement de soi. Virginie Despentes s'assume telle qu'elle est et le dit clairement sur le mode de la syncope et de l'effet de rupture, autant de marques d'une syntaxe qui va droit à l'essentiel et qui emprunte le plus souvent à la langue parlée.

Les phrases sont courtes, incisives et ajoutent à l'alacrité du procès narratif : « Je ne suis pas douce je ne suis pas aimable je ne suis pas une bourge. J'ai des montées d'hormones qui me font comme des fulgurances d'agressivité. Si je ne venais pas du punk-rock, j'aurais honte de ce que je suis. Pas foutue de convenir à ce point-là. Mais je viens du punk-rock et je suis fière de ne pas très bien y arriver. »

De son adolescence, où elle fut victime d'un viol, et de sa période de prostitution, elle garde le caractère farouche et le franc parler d'un individu affranchi de toute morale qui se fait le porte-parole des laissées-pour-compte : les lesbiennes, les femmes de la rue, les gamines des banlieues, les femmes noires, les actrices de X, les femmes écrivains et, par extension, toutes celles qui ont « tué l'ange du foyer », comme l'écrit Virginia Woolf qu'elle cite en épigraphe de sa dernière partie ; ces femmes qui ont su dire non à un moment de leur vie à la phallocratie régnante.

« À quand l'émancipation masculine ? », demande-t-elle, et d'y répondre par la mise en exergue du concept de puissance qui n'est ni l'apanage de l'homme, ni celui de la femme, mais le fait de l'individu qui a su construire son existence en puisant dans les ressources de sa volonté créatrice, pour le dire comme Friedrich Nietzsche : « Question d'attitude, de courage, d'insoumission. Il y a une forme de force, qui n'est ni masculine, ni féminine, qui impressionne, affole, rassure. Une faculté de dire non, d'imposer ses vues, de ne pas se dérober. »

Éditions : Le Livre Poche n° 30904

Date de parution : 3 octobre 2007. Nombre de pages : 151 p. Prix : 6,10 €. EAN 9782253122111

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