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montagnes

PUBLICATIONS LXVI

Récit fictionnel

Paris

JEAN-MICHEL TARTAYRE

 

 

 

 

UNE ENQUÊTE D’ART JUNGLE

L’Insu

 

 

 

 

Récit fictionnel

 

 

 

 

 

 

Les sons s’harmonisent naturellement aux rythmes des signes que la plume trace sur la page quand je compose un poème. Il s’agit d’un phénomène agréable aux sens qui, de fait, accueille leur potentiel dans le cadre de la générosité florale. La plume crée des bouquets propres à l’absolu de parfum dès lors que mon regard se pose sur mon jardin ou sur la Montagne-qui-parle. Ce matin il est 7 heures et, après avoir dégusté une omelette au jambon, pris le  café assorti d’un croissant, fait le ménage et m’être douché, j’écris quelques vers. Les voici :

 

N'étant rien qu’à soi,

Je nous retrouve en silence. –

Le jour te conduit.

 

Je range le poème à sa place, dans ma chemise cartonnée, et quitte la maison. Il est 7, 30 AM. J’ai rendez-vous dans le bureau du Commandant O. à 8 heures. Je démarre les Mercury, détache le bateau du quai et m’éloigne de l’embarcadère de M., mon village, à vitesse réduite. L’aurore me conduit sur le Grand Fleuve en cette saison des pluies qui commence. J’observe ses reflets d’or dansant sur les nuages et la surface de l’eau avec un sentiment à la fois d’admiration et d’humilité. Le grand félin de la Forêt salue l’aurore de son rugissement au lever.

 

À 7, 55 AM, j’accoste le quai du Secteur 3. Le Commandant O. me reçoit à 8 AM, comme prévu.

« – Asseyez-vous, Jungle ; je vous en prie. Voici le dossier, tenez. Il comprend, entre autres documents et plusieurs pièces à conviction, quatre dépôts de plainte. Le Capitaine B. et son équipe ont interpellé l’individu hier soir. Je sais que vous restez disponible pendant vos congés. J’ai pensé à vous pour interroger le suspect, raison pour laquelle je vous ai contacté. Vous serez deux à mener l’interrogatoire. Le Capitaine B. et vous. Ça se passera dans le bureau du Capitaine. Il arrive dans une heure. La garde à vue est donc en place depuis hier, 9 PM. Mais je vous laisse d’abord découvrir le dossier.

– Merci, mon Commandant. »

 

Je tourne les pages en lisant en détail les informations que chacune d’elles contient. Le suspect est désigné dans tous les cas comme, je cite, un trompeur. Je lis les faits. Il est question de vol et de trafic de stupéfiants. Plus de 400 000 euros furent dérobés à quatre couples. Curieusement, il est question de consentement de la part de ces derniers au début et même, je cite une victime, de relation amicale. Le Commandant O. était sortie, le temps de ma lecture. Elle revient.

« – Qu’en pensez-vous, Lieutenant ?

– Le suspect abuse de la confiance des gens.

– Oui. Et il a déjà un casier. Voyez …

– En effet, narcotrafic, association de malfaiteurs, 10 ans de prison ferme.

– Vous pouvez y aller, Lieutenant. Le Capitaine B. ne va pas tarder. Je vais vous ouvrir son bureau. »

 

Dix minutes après que je me suis installé dans le bureau du Capitaine B. ce dernier arrive, me dit bonjour.

« – Bonjour Capitaine.

– Vous avez allumé les ordinateurs. Merci, Jungle. Je vais chercher le suspect. »

 

Le gardé à vue entre, précédé par le Capitaine B. et encadré par deux agents, le Caporal S. et le Sergent T. Il est menotté. Le Capitaine B. prend place à côté de moi derrière le bureau. Le Caporal S. et le Sergent T. restent debout, respectivement à gauche et à droite du suspect qui s’est, quant à lui, assis à son tour.

« – Bonjour, Monsieur E., commence le Capitaine B. Vous êtes ici en premier lieu car on vous accuse d’extorsion de fonds. Les familles H., M., P. et A. ont porté plainte. Vous êtes aussi ici pour cause de narcotrafic. S’agissant du futur premier chef d’accusation, les faits s’échelonnent sur une durée de deux ans. Je cite Monsieur P. Il vous désigne comme un ami de la famille qui a d’abord inspiré confiance à mon épouse et à nos enfants, puis il s’est révélé un véritable criminel, en tentant de séduire mon épouse, enfin en nous engageant l’un et l’autre à souscrire une adhésion aux activités de son entreprise qu’il nous présenta comme une association à but humanitaire. Nous avons perdu plus de 100 000 euros dans la participation à cette société qui n’existe au demeurant pas. Qu’en dites-vous, Monsieur E. ?

– C’est faux. Je rejette en bloc.

– En bloc ? Et ça, Monsieur E. ? Regardez bien ce relevé de compte bancaire. Oui, bien sûr, vous allez me dire que ce n’est pas vous puisqu’il s’agit d’un certain Monsieur N.

– Justement, ce n’est pas moi.

– Exact. J’ai fait mes recherches. Mais Monsieur N. n’est autre que votre associé. Il n’était pas avec vous hier soir au moment de l’interpellation, et pour cause.

– Je ne comprends pas ce que vous me dites.

– Je vous explique. Nous avons arrêté Monsieur N. avant vous, il y a dix jours.

– Je ne comprends toujours pas. Vous êtes un affabulateur !

– S’il vous plaît, Monsieur E. Lieutenant Jungle, une question ?

– Vous ne connaissez pas Monsieur N., Monsieur E. ? Regardez cette photographie où, inutile peut-être que je vous le précise, on vous voit ensemble en pleine conversation à la terrasse du « Rendez-vous ». Le Sergent T., ici présent à vos côtés, l’a prise à votre insu. C’était l’été dernier. Vous vous reconnaissez ou pas ? Attendez, je zoome. Là, c’est bien vous, non ? Oui ou non, Monsieur E. ?

– Oui, je reconnais. C’est bien moi.

– Capitaine B., je vous redonne la parole.

– Merci, Lieutenant Jungle. Quelque chose qui ne va pas, Monsieur E. ? Je vous sens nerveux. Non, n’essayez pas de vous lever. Restez assis, s’il vous plaît ! »

 

L’homme se lève d’un bond et nous insulte, le Capitaine B. et moi. Le Caporal S. le saisit à l’épaule et l’oblige à se rassoir poliment.

 

« – Je poursuis, dit le Capitaine B. Oui, Monsieur E., votre associé, Monsieur N., nous a parlé de vous. Le butin extorqué aux quatre familles se monte à, précisément, 425 000 euros. À l’appui, ces cinq autres relevés bancaires.

– Arrêtez, Capitaine ! Je ne veux pas les voir !

– Comme vous voudrez, Monsieur E. Vous aviez, n’empêche, vous et votre associé, monté une affaire très juteuse, n’est-ce pas ? J’entends par ce terme, je vous le concède un peu familier néanmoins plus respectueux que le furent vos insultes il y a une minute, j'entends par ce terme, disais-je, le trafic de stupéfiants dans lequel vous avez replongé.

– Quoi ? J’ai déjà payé ma dette à la société pour ça !

– À croire que non. Dix ans de prison ne vous ont pas suffi. Je note deux hectares de trop. C’est là le futur deuxième chef d’accusation à quoi vous serez soumis.

– Que racontez-vous encore ?

Encore, c’est ça. Vous êtes, Monsieur E., le propriétaire d’une exploitation où vous cultivez, entre autres plantes médicinales, l’erytrhroxylum coca. Le champ où pousse l’erythroxylum coca a une superficie de deux hectares.

– Mais vous inventez !

– Non, Monsieur E. ... Lieutenant Jungle, une remarque ?

– Oui, mon Capitaine. Regardez maintenant cette photographie, Monsieur E. C’est votre propriété vue d’avion. Le Caporal S., ici présent à vos côtés, l’a prise à votre insu. C'est bien là le cadre de la soi-disant association humanitaire dont vous et votre associé, Monsieur N., êtes à la tête. Vous abusez des innocents pour satisfaire et financer votre trafic. Vous faites accroire, Monsieur E. !

– Où est N. ?

– Le Capitaine B. vous l’a dit précédemment. N. est en prison.

– Je veux mon avocat ! Où est mon avocat ?

– Vous devenez confus, Monsieur E. Vous aurez bientôt tout le temps de vous entretenir avec votre avocat. Nous avons en attendant à vous montrer des pièces à conviction. Regardez cette autre photographie par exemple, Monsieur E. Le Capitaine B., ici présent face à vous, l'a prise à votre insu. C’est le contenu du sac que Monsieur N. a découvert quand le Capitaine B. et les deux agents ici présents à vos côtés se sont rendus chez lui pour l’interpeller : 50 kg de cocaïne.

– Comment avez-vous su pour N. ?

– N. a simplement commis une fausse déclaration.

– Que voulez-vous dire ?

– Il n’a pas déclaré la totalité de ses revenus. Il manquait les 120 000 euros extorqués à la famille P. Il s'en est servi pour clôturer un L.O.A., en l'occurrence celui du yacht à bord duquel vous et lui pensiez accomplir un tour du monde, réalisant ainsi votre magnifique évasion … Capitaine, je vous en prie.

– Je vous remercie, Lieutenant Jungle. Nous allons conclure, Monsieur E. Ce n’est pas bien ce que vous faites. Nous avons heureusement eu le temps de réunir les preuves qui vous accusent. Votre avocat les a désormais en main. Voilà. Vous récidivez, Monsieur E. C’est une circonstance aggravante et vous le savez. Vous abusez de la confiance des gens honnêtes pour entretenir votre commerce illégal. Vous prenez la société pour une demeurée. Vous faites accroire à la société sans vous inquiéter des Instances qui la fondent. Ne pouviez vous pas vous contenter de votre statut social, très respectable pourtant, vous et votre associé ? Qu’avez-vous fait tous les deux ?

– Je n’ai que faire de vos leçons !

– C’est un constat, Monsieur E. Et c’est votre affaire. Nous l’avons résolue, mes collègues et moi. Je vous laisse, entre les mains de la Justice et … à vos propres questions. »

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