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Lumière et ombre

Ce n'est pas par la satisfaction des désirs que s'obtient la liberté, mais par la destruction du désir.

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                                                Epictète

PROPOS SUR UNE ANTITHÈSE :

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L' AUTOSATISFACTION ET  L' AUTOSUFFISANCE

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Il m’est apparu, en discutant avec des personnes bienveillantes, qui m’inspiraient une totale confiance, que deux termes très souvent utilisés dans le langage courant se distinguaient par leur opposition très sensible s’agissant de la compréhension de soi et des choses. Ce sont autosatisfaction et autosuffisance.

 

Quelle différence s’avère remarquable en l’occurrence ?

Si je prends d’abord l’exemple d'autosatisfaction en lisant le dictionnaire, je constate que ses signifiés ont, d’un point de vue étymologique, pour référent, le plaisir de soi, étant donné que le préfixe grec auto signifie soi-même, et que le radical a pour signifiant latin le verbe facio, is, ere, feci, factum, qui veut dire faire. S'agissant du terme satis complétant ce radical, il demeure en position d'adverbe ; c'est, de fait, un mot invariable qui signifie assez, suffisant et dont le référent est la quantité.  Autosatisfaction est, pour cette raison, un terme dont on ne peut exclure la dimension de plaisir ; il renvoie donc à un accomplissement du plaisir par soi-même et pour soi-même, si l’on observe avec attention sa morphologie.

 

Autosuffisance propose une morphologie tout à fait différente, ce dans la mesure où le référent est le besoin vital. Ce nom fait référence à la dimension de quantité, comme le terme autosatisfaction, mais également, et surtout, à celle de nécessité, toujours d’après le dictionnaire. Autosuffisance est ainsi synonyme  du mot autonomie.

 

On s’aperçoit que ces deux mots, assez proches orthographiquement, ont des significations d’ordre morphologique différentes. L’autosatisfaction peut-être le fait des sentiments, ou bien d'un complexe tel que le diagnostique et le propose le Docteur Sigmund Freud dans son oeuvre, et implique un seuil. On parle de seuil de satisfaction en effet. Si l’on ajoute à ce radical le préfixe auto, ce seuil ne peut être fixé que par soi-même. Tandis que l’autosuffisance renvoie à l’autonomie, comme dit précédemment, et à une conformité aux règles. L’autosuffisance est un fait de maturité, de majorité de pensée, de raison. Ce qui n’est pas forcément le cas dans le domaine de l’autosatisfaction. Dans le premier cas, la personne obéit et suit le cours naturel des choses ; dans le second cas, elle peut marquer un arrêt et se contenter, se satisfaire, d’elle-même, par confort.

 

Peut-on se satisfaire de soi-même, si l’on n’obéit qu’à soi-même ? Cette problématique est soulevée par Jean-Paul Sartre et Albert Camus lorsqu’ils traitent du confort intellectuel dans le cadre de leurs études respectives à propos de la Lutte des Classes. L’équilibre serait donc le fait de l’autosuffisance, par l’acquisition de la majorité, de l’obéissance à l’ordre naturel des choses et non pas dans l’obéissance qu’à soi-même.

 

L’autosuffisance est une prise de conscience des ordres social, écologique, économique, politique et juridique. Un ensemble qui appartient de fait à l’ordre naturel des choses, celui d’un État, d’une société donnée. L’autosatisfaction n’est qu’un contrat passé entre soi et soi, et peut se traduire par un mépris du contrat social et de ses règles ; lesquelles règles sont déterminées par de nombreux philosophes ; je pense là en particulier à Jean-Jacques Rousseau et à Montesquieu.

 

Enfin, est-il logique de s’autosatisfaire, ou de se complaire, quand le monde souffre ? Chaque jour, l’actualité médiatique nous le montre, nous le fait entendre. L’autosuffisance y répond en proposant de s’assumer et de se responsabiliser en tant que citoyen et ce, par devoir et obéissance. Arthur Rimbaud en fait le constat, alors qu’il n’a pas encore seize ans, par sa réflexion Je est un autre.

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Jean-Michel TARTAYRE

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