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Paysage de montagne

PROPOS SUR L’ÉMOTION

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Écrire sur l’émotion, n’est-ce pas se demander en premier lieu ce que ce terme signifie ? Il renvoie à l’idée de mouvement par son étymon latin moveo, es, ere, movi, motum qui se définit en langue française par les verbes se déplacer, mettre en mouvement, ébranler.

 

Émouvoir, s’émouvoir, c’est exprimer, c’est la parole du corps, que la comédienne ou le comédien donne à voir sur scène.  Mais l’émotion part d’un mouvement intérieur de notre psyché, ce que le Docteur Sigmund Freud identifie et nomme la motion. Ce qui, au théâtre, notamment, demeure exprimé.

 

L’émotion est ainsi, comme l’affirme Sir Charlie Chaplin, le langage par excellence du Théâtre.

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Et les silences mettent en valeur l’émotion dans le rythme d’une pièce de théâtre. Nathalie Sarraute, par exemple, traite des Tropismes et les met en scène en accordant aux mots des résonances qui se fondent sur le silence, en en faisant presque une seule et même matière. Je dis presque car la sonorité du mot demeure présente, cependant au sein de l’épaisseur considérable des signifiés, qui s’augmente encore des grandes plages de silence que cette très grande dramaturge ménage à la fois dans l’écriture graphique et scénique.

 

De fait, l’émotion, en tant qu’expression du corps, est associable aux mots et au silence. La voix de la comédienne, du comédien, peut apparaître comme un instrument nécessaire à l’émotion, excepté dans le mime.

 

Le mime est un ensemble d’émotions exprimé par un personnage qui ne parle pas. Ce dernier demeure un signe sans paroles. Le mime est le fait de la comédienne, du comédien, comme de la danseuse et du danseur. Ces artistes sont des incarnations d’idées en l’occurrence, sans voix. Dans la mesure où l'on ne peut dissocier l'idée de la motion. L'idée va entraîner un mouvement de colère, par exemple, si l'idée est corrompue - soit par excès de narcissisme, soit par le fait d'une agression -  ;  ou bien un mouvement de joie, si l'idée est de nature. Mais le propre de l'artiste est de l'exprimer, de les exprimer, avec maîtrise et sérénité, j'entends par une parfaite maîtrise intellectuelle, physique.

 

Le ressort de la voix peut augmenter l’expression mais l’impression sur le spectateur n’est pas forcément plus marquée.

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Toute émotion relève de l’intellect.

 

Ce que le mime traduit est, sur ce plan, fidèle au mouvement de notre psyché, car il s'agit de le reproduire, avec ou sans exagération, par un mouvement du corps. L’émotion à laquelle reste associée la voix lui est non moins fidèle, avec ou sans exagération, et elle demeure augmentée par le phénomène acoustique.

 

On note six émotions : la joie, la peur, la colère, le dégoût, la tristesse et la surprise. Ce sont les émotions de base, étant donné que leurs variations et combinaisons sont multiples. La voix, en les exprimant, et par le fait de sa nature acoustique peut, sans doute, les adapter toutes. Une très grande artiste, un très grand artiste, peut également toutes les adapter avec son corps en mouvement.

Ou avec un instrument de musique. S’il est musicien.  Avec un pinceau, s’il est peintre ; une truelle, un marteau, un biseau, une hache, un couteau, s’il est sculpteur, ébéniste, charpentier, menuisier, maçon. Ou avec un stylet, une plume, s’il est mathématicien, physicien, philosophe, architecte, écrivain, poète, traducteur, interprète, exégète. Avec un appareil de photographie, une caméra, s'il est photographe, caméraman, réalisateur. Et ce, toujours dans la sérénité.

 

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Les actrices, les acteurs, de cinéma, sont, quant à eux, au sein d’un décor réaliste où l’image en mouvement a le premier rôle.  L’émotion, dans ce cas, est de nature audio-visuelle et numérique. Elle est transmise au téléspectateur ou au spectateur par le phénomène lumineux.

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Somme toute, l’expression des mouvements que peut connaître la psyché cristallise dans le regard du spectateur - ou du lecteur, s’il s’agit d’un livre où les personnages sont animés par l’écriture sur papier. Mais le spectateur est également un lecteur. Regarder, écouter un spectacle, lire un livre, écrire, sont des actes de libération de même nature, pour soi-même, par la raison qu’ils constituent un lien social nécessaire. Regarder, lire, écouter une artiste, un artiste, est un acte social, grâce auquel s’opère la catharsis. Un acte majeur.

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Jean-Michel TARTAYRE

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Sylvie Guillem.

Hélène Grimaud. Une photographie de Mat Hennek.

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Sir Charlie Chaplin  et Jackie Coogan dans The Kid (1921). Un document Wikipédia et Pinterest.

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